Droits linguistiques des minorités canadiennes francophone et anglophone

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Bulletin du PADL

Le bulletin du PADL a pour but d’informer les canadiens et canadiennes des actualités dans le domaine des droits linguistiques et d’annoncer les événements du PADL.

PADL EN DIRECT - Édition du mois de juillet 2016

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Lettre à l'éditeur de l'Acadie Nouvelle

L’objectif de cette lettre est de clarifier quelques informations dans l’article publié le 25 octobre 2015 intitulé « Stephen Harper était-il vraiment un monstre francophobe? ».

Il est vrai qu’en septembre 2006 le gouvernement conservateur a aboli le Programme de contestation judiciaire (PCJ) et que la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) et le Commissaire aux langues officielles ont intenté une poursuite devant les tribunaux pour rétablir son financement.

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La lettre qui suit a été publiée dans l'Acadie Nouvelle le 30 octobre 2015. 

Le 26 octobre 2015

 

L’objectif de cette lettre est de clarifier quelques informations dans l’article publié le 25 octobre 2015 intitulé « Stephen Harper était-il vraiment un monstre francophobe? ».

Il est vrai qu’en septembre 2006 le gouvernement conservateur a aboli le Programme de contestation judiciaire (PCJ) et que la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) et le Commissaire aux langues officielles ont intenté une poursuite devant les tribunaux pour rétablir son financement.

La FCFA et le Commissaire ont réussi à négocier une entente hors cours avec le gouvernement fédéral qui met sur pied un nouveau programme pour appuyer financièrement les communautés à revendiquer leurs droits linguistiques devant les tribunaux, soit le Programme d’appui aux droits linguistiques (PADL). À son ouverture en 2009, le PADL recevait déjà ses premières demandes de financement pour de nouveaux recours judiciaires, ce qui incluait les recours judiciaires intentés depuis l’abolition du PCJ, le 25 septembre 2006. Le PADL existe depuis déjà plus de 5 ans, son mandat ayant été renouvelé en 2012.

Les communautés de langue officielle en situation minoritaire ne sont pas dépourvues de mécanisme pour défendre leurs droits linguistiques constitutionnels devant les tribunaux canadiens en raison de l’abolition du PCJ puisque le PCJ a été remplacé par le Programme d’appui aux droits linguistiques.

Le Programme d’appui aux droits linguistiques comporte :

  • un volet d’information et de promotion orienté par une stratégie à long terme visant à éduquer les communautés de leurs droits linguistiques constitutionnels par l’entremise de campagnes, de projets et d’études d’impact;
  • un volet de modes alternatifs de résolution de conflit (MARC) qui offre du financement lorsque les parties impliquées dans un recours doivent, par exemple, négocier les termes de leur entente;
  • un volet de recours judiciaires qui offre 125 000$ pour un procès – comparativement au PCJ qui n’offrait que 60 000$ – ainsi que du financement pour les intervenants au procès, les appels et la résolution de différend à l’intérieur d’un litige.

Depuis son ouverture, le PADL a traité 220 demandes de financement dont 155 ont reçu du financement. Parmi les demandes financées, citons l’affaire récente impliquant L’Association des parents de l’école Rose-des-Vents à Vancouver dont le jugement, publié en avril 2015, a établi que les ayant droits de l’école Rose-des-Vents ont droit à des écoles de langue française équivalentes à celles de la majorité anglophone.

Dans la liste de demandes financées par le PADL se retrouvent également les recours judiciaires suivants qui ont eu lieu à travers le Canada : R. c. Losier, R. c. Caron (intervention), Comité SOS CBEF c. Société Radio-Canada, FCFA c. Procureur général du Canada, Parents pour une école francophone dans la Vallée c. ministère de l’Éducation du N.-B., Perron c. Perron, Thibodeau c. Air Canada

Les communautés de langue officielle en situation minoritaire peuvent continuer à compter sur le Programme d’appui aux droits linguistiques pour appuyer leurs démarches en vue de promouvoir, clarifier et faire avancer leurs droits linguistiques constitutionnels et assurer leur pérennité.

 

Geneviève Boudreau

Directrice du Programme d’appui aux droits linguistiques

La Cour suprême du Canada ne reconnait pas le bilinguisme législatif en Alberta et en Saskatchewan

Dans une décision très attendue, la Cour suprême du Canada a rejeté, le 20 novembre 2015, l’appel de Gilles Caron et Pierre Boutet dans le dossier Caron c. Alberta. Par ce fait même, le plus haut tribunal du pays écarte essentiellement la notion d’un bilinguisme législatif au niveau provincial en Alberta et en Saskatchewan.

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Par Eric Cormier
Conseiller juridique, PADL

 

Dans une décision très attendue, la Cour suprême du Canada a rejeté, le 20 novembre 2015, l’appel de Gilles Caron et Pierre Boutet dans le dossier Caron c. Alberta. Par ce fait même, le plus haut tribunal du pays écarte essentiellement la notion d’un bilinguisme législatif au niveau provincial en Alberta et en Saskatchewan.

Les appelants, qui avaient chacun été accusés d'infractions à la Traffic Safety Act (code de la sécurité routière) de l’Alberta, avaient plaidé en première instance devant la Cour provinciale de l’Alberta que la loi et son règlement étaient invalides du fait que la province de l'Alberta avait une obligation constitutionnelle de publier ses lois en anglais et en français.

Cette obligation, ont-ils argumenté, découle du bilinguisme  dont bénéficiaient les habitants de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord-Ouest (qui formaient autrefois les provinces de l’Alberta et la Saskatchewan) lorsque ces territoires étaient sous le contrôle de la Compagnie de la Baie d'Hudson. Selon les appelants, ces droits linguistiques auraient subsisté lors de l’annexion de ces territoires au Canada par le biais de la Proclamation royale et le Décret de 1870, ayant comme effet d’enchâsser ces droits dans la Constitution canadienne. Le juge Wenden de la Cour provinciale de l’Alberta a accepté les arguments de M. Caron et M. Boutet et les a déclarés non coupables.

En appel, la Cour du Banc de la Reine a infirmé ce jugement, concluant que les droits linguistiques dont jouissaient les habitants de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord-Ouest n'avaient pas été enchâssés lors de leur annexion au Canada. Dans un appel subséquent, la Cour d'appel de l’Alberta a unanimement maintenu la décision rendue par la Cour du Banc de la Reine.

Dans son jugement, la majorité des juges de la Cour suprême du Canada abonde dans le même sens que la Cour d’appel albertaine. Selon la Cour suprême, il faut rejeter l’argument qu’il existe un droit constitutionnel au bilinguisme législatif en Alberta qui émane d’une entente énoncée dans l’Adresse de 1867 (plus tard annexée au Décret de 1870) assurant que le Canada respecterait les « droits acquis » de la population de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord-Ouest.

La Cour suprême rappelle que les droits linguistiques ont toujours été conférés de manière claire et explicite, citant comme exemples l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 et l’article 23 la Loi de 1870 sur le Manitoba qui garantissent le bilinguisme au parlement canadien et dans les législatures du Québec et du Manitoba. Selon la Cour, l’absence d’un libellé similairement explicite dans le Décret de 1870, qui, rappelle-t-elle, fut adopté à la même époque, « affaiblit sérieusement l’argument des appelants selon lequel les expressions « droits acquis » ou « droits légaux » (« legal rights ») qui figurent dans l’Adresse de 1867, annexée au Décret, devraient être interprétées de façon à englober les droits linguistiques ».

Dans sa conclusion, la majorité des juges de la Cour suprême soutient que les arguments présentés par les appelants ont des conséquences d’une portée considérable qui obligeraient la Cour à conclure, entre autres, que le bilinguisme a été constitutionnalisé non seulement en Alberta, « mais également dans toutes les terres qui appartenaient auparavant à la Compagnie (de la Baie d’Hudson) et qui ressortissent maintenant à la Saskatchewan, à l’Ontario, au Québec, au Yukon, au Nunavut et aux Territoires du Nord-Ouest actuels ». Même chose en ce qui a trait à l’obligation de nommer des juges bilingues à la Cour supérieure – une revendication qui avait été faite par les colons à l’époque et qui était la pratique dans cours territoriales avant l’annexion.

La Cour est toutefois catégorique que ces arguments ne peuvent pas être retenus. Selon elle, sans la présence d’éléments de preuve textuels et contextuels clairs qui garantissent un bilinguisme législatif au sein d’une province, celle-ci a le pouvoir de décider dans quelles langue ou langues seront rédigées ses lois.

En dissidence, les juges Abella, Wagner et Côté ont plutôt penché du côté des appelants, soutenant que l’Alberta a bel et bien une obligation constitutionnelle d’édicter, d’imprimer et de publier ses lois dans les deux langues officielles. Selon eux, l’entente historique conclue entre le gouvernement canadien et les habitants de la Terre de Rupert et du Territoire du Nord‑Ouest « contenait une promesse de protéger le bilinguisme législatif ».

Les juges dissidents relèvent trois principes importants dans leur interprétation de l’Adresse de 1867 : soit la nécessité d’interpréter la Constitution à la lumière de ses contextes historique, philosophique et linguistique; la nécessité d’appliquer une interprétation large et téléologique aux dispositions constitutionnelles; et le besoin de reconnaitre l’expression de la volonté d’un peuple comme étant l’essence même d’une constitution.

Pour les juges dissidents, le dossier historique démontre que le bilinguisme législatif existait dans l’ensemble des territoires avant l’annexion. Ils soutiennent que les représentants des territoires avaient réclamé le bilinguisme législatif comme condition d’annexion, « et leur demande ne s’est heurtée à aucune résistance à cet égard de la part du Canada ». Dans ce contexte, ils concluent que « l’Adresse de 1867 a consacré la promesse de bilinguisme législatif, une interprétation qu’étayent des documents ultérieurs, dont la Proclamation royale de 1869 ».

D’autre part, les juges dissidents soutiennent que rien dans la Loi de 1870 sur le Manitoba ne vient contredire une telle interprétation. Ils argumentent que cette loi a plutôt servi à assurer la continuité du bilinguisme législatif dans l’ensemble des territoires après l’annexion. À leur avis, « le dossier historique démontre clairement l’existence d’une entente qui protégeait le bilinguisme législatif dans l’ensemble des territoires annexés. Cette entente a été constitutionnalisée dans le Décret en conseil sur la Terre de Rupert et le Territoire du Nord‑Ouest (1870) – auquel l’Adresse de 1867 est annexée – comme le confirment les événements de l’époque ».

La cause Caron n’est pas le premier échec dans la quête de faire reconnaitre un bilinguisme législatif dans une province de l’Ouest. En 1988, dans l’affaire R. c. Mercure, l’appelant avait aussi échoué de convaincre la Cour suprême d’être en faveur du bilinguisme législatif pour la province de la Saskatchewan. Bien que les arguments présentés dans Mercure comportaient des similarités avec ceux de la présente affaire, les appelants dans l’affaire Caron ont offert un compte-rendu historique beaucoup plus approfondi sur l’annexion de la Terre de Rupert et le Territoire du Nord‑Ouest au Canada. Or, ces efforts de brosser un portrait plus précis des débats entourant l’adoption de la Proclamation royale du Décret de 1870 n’ont pas suffi à convaincre la majorité des juges de la Cour suprême.

À la lumière de la décision dans Caron, force est de croire que le débat juridique sur la question du bilinguisme législatif en Alberta et en Saskatchewan ne sera pas rouvert pour plusieurs années.

Le retour du questionnaire long du recensement : bonne nouvelle pour les CLOSM

Le nouveau gouvernement libéral a annoncé le 5 novembre 2015 le retour du questionnaire long obligatoire du recensement, soit une seule journée après son assermentation officielle. L’annonce de son abolition en 2010, sous la bannière du gouvernement conservateur, avait provoqué un vague de protestation tant chez les statisticiens, les fonctionnaires et les universitaires, que chez les groupes d’intérêt des minorités au Canada. 

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Par Eric Cormier
Conseiller juridique, PADL

 

Le nouveau gouvernement libéral a annoncé le 5 novembre 2015 le retour du questionnaire long obligatoire du recensement, soit une seule journée après son assermentation officielle. L’annonce de son abolition en 2010, sous la bannière du gouvernement conservateur, avait provoqué un vague de protestation tant chez les statisticiens, les fonctionnaires et les universitaires, que chez les groupes d’intérêt des minorités au Canada. 

Parmi ces groupes qui dépendent largement des renseignements collectés par l’entremise du questionnaire long du recensement, les communautés de langues officielles en situation minoritaire (CLOSM) furent particulièrement touchées. Comme le mentionnait à l’époque la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Marie-France Kenny, au journal Le Droit, « ce sera difficile pour le gouvernement de mesurer combien de francophones ou de «parlants français» il y a dans chacune des provinces pour assurer le service». 

La FCFA avait entrepris en 2010 un recours judiciaire à l’encontre du gouvernement fédéral dans le but d’invalider la décision d’abolir le questionnaire détaillé (voir Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada c. Canada (Procureur général), 2010 CF 999). Ce recours fut d’ailleurs financé en partie par le Programme d’appui aux droits linguistiques. 

Devant la Cour fédérale, la FCFA avait avancé l’argument que l’élimination du questionnaire long obligatoire du recensement, qui priverait le gouvernement du Canada et les CLOSM de données statistiques fiables, constituait une contravention à la partie VII de la Loi sur les langues officielles (LLO) qui impose aux institutions fédérales à prendre des mesures positives pour favoriser l'épanouissement des communautés minoritaires. Pour la FCFA, ces données étaient essentielles à la capacité du gouvernement fédéral de faire face à ses engagements et aussi de permettre aux institutions fédérales de s'acquitter de leurs obligations légales en matière de langues officielles.

Dans son jugement, la Cour fédérale a toutefois rejeté la demande de la FCFA. Selon la Cour, les mesures positives invoquées à la partie VII de la LLO ne comportaient pas le devoir de recueillir des données par la voie d'un questionnaire long à caractère obligatoire. De plus, la Cour a soutenu que la façon dont s'opère le recensement est laissée à la discrétion du gouvernement, et que la partie VII de la LLO n'impose pas au une méthodologie particulière en la matière. 

L’annonce du retour du long questionnaire du recensement sera ainsi certainement bien reçue chez les CLOSM et les organisations qui œuvrent à défendre leurs droits. 

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La Cour suprême n’entendra pas les causes sur les droits scolaires dans les Territoires du Nord-Ouest

La Cour suprême du Canada a rejeté, le 29 octobre 2015, la demande d’autorisation de la Commission Scolaire Francophone, Territoires du Nord-Ouest (CSFTN-O) et de l’Association des parents ayants droit de Yellowknife (APADY) de porter en appel deux décisions rendues par la Cour d’appel des Territoires du Nord-Ouest plus tôt cette année. (Vous pouvez les consultez ici et ici.)

Qu’est-ce que cela signifie pour ces deux requérants et pour les commissions scolaires et les associations de parents ayants droit ailleurs au pays?

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Par Eric Cormier, conseiller juridique, PADL

La Cour suprême du Canada a rejeté, le 29 octobre 2015, la demande d’autorisation de la Commission Scolaire Francophone, Territoires du Nord-Ouest (CSFTN-O) et de l’Association des parents ayants droit de Yellowknife (APADY) de porter en appel deux décisions rendues par la Cour d’appel des Territoires du Nord-Ouest plus tôt cette année. (Vous pouvez les consultez ici et ici.)

Qu’est-ce que cela signifie pour ces deux requérants et pour les commissions scolaires et les associations de parents ayants droit ailleurs au pays?

Historique des causes

CSFTN-O

En 2008, la CSFTN-O a obtenu une injonction pour la construction de salles de classe supplémentaires à l’École Boréale de Hay River pour répondre à la demande croissante d’étudiants. La même année, le ministre de l’Éducation a adopté une directive limitant les critères d’admissibilité des élèves et créant un plafond d’élèves admissibles.

En première instance, la Cour suprême des Territoires du Nord-Ouest a ordonné au gouvernement territorial de construire plus d’installations scolaires de langue minoritaire. La Cour a également déclaré que la directive du ministre de l’Éducation était contraire à l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (Charte).

Ensuite, la Cour d’appel des Territoires du Nord-Ouest a conclu que la décision du juge de première instance donnait trop de pouvoirs à la Commission scolaire, l'élevant au niveau d'une institution gouvernementale. La Cour a également conclu que le juge de première instance a commis une erreur en jugeant que la directive du ministre était inconstitutionnelle. Selon la Cour d’appel, l'expansion des installations ne peut pas être justifiée par le nombre croissant d'étudiants, étant donné l'admission des élèves de parents non-ayants droit dans l’école francophone.

APADY

En ce qui concerne la cause impliquant l’APADY, le juge de première instance avait conclu que l’école francophone de Yellowknife devrait être élargie et que des installations plus adéquates devraient y être construites afin que celles-ci soient comparables à celles de l’école anglophone avoisinante. Dans la seconde partie du jugement, le juge a conclu qu'il n'existe pas de droit linguistique constitutionnel dans le contexte des programmes de garderies et prématernelles.

La Cour d’appel des Territoires du Nord-Ouest a annulé la première partie de la décision de première instance, estimant que le juge de première instance a commis une erreur en comptant les enfants de parents non-ayants pour justifier une expansion de l’école ou la construction d’installations additionnelles. Selon la Cour d’appel, il n'y a rien d’inconstitutionnel dans le fait de partager des espaces avec des écoles anglophones voisines pour les programmes spécialisés. En ce qui concerne la deuxième partie, la Cour d’appel s’est dite d’accord avec la conclusion du juge de première instance que les programmes de garderies préscolaires et prématernelles ne sont pas protégés en vertu de l'article 23 la Charte.

L’état du droit

Le rejet par la Cour suprême du Canada de la demande d’autorisation d’appel de la CSFTN-O et de l’APADY le 29 octobre ne surprend acheter viagra pas, particulièrement dans l’optique de la décision récente de cette même Cour dans l’arrêt Commission scolaire francophone du Yukon, district scolaire #23 c. Yukon (Procureure générale), 2015 CSC 25. Dans le dossier yukonnais, la Cour suprême a jugé qu’une commission scolaire n'a pas le pouvoir de fixer unilatéralement des critères d'admission de non-ayants droit qui sont différents de ceux établis dans les lois et règlements de la province ou du territoire en question, à moins que ces pouvoirs soient délégués explicitement à la commission scolaire par le gouvernement.

Cette situation nous rappelle aussi la décision récente de la Cour suprême dans Association des parents de l’école Rose-des-vents c. Colombie-Britannique (Éducation), 2015 CSC 21. Dans cette affaire, la Cour a soutenu l’importance d’offrir aux communautés de langue officielle en situation minoritaire des installations scolaires de qualité équivalente à celles offertes à la majorité. Toutefois, dans le cas de Rose-des-vents, la Cour ne s’est pas prononcée directement sur la question d’inclure les enfants de parents non-ayants droit voulant assister à l'école francophone lorsqu’il est temps de déterminer les besoins en matière d’installations scolaires.

En rejetant la demande de la CSFTN-O et de l’APADY, le plus haut tribunal du pays (qui n’émet d’ailleurs jamais de motifs lors de rejets de demande d’autorisation d’appel) semble renforcer la notion que l’article 23 de la Charte ne puisse pas servir d’instrument pour tenter de limiter la compétence exclusive des provinces et des territoires en ce qui a trait à la réglementation de l’admission des non-ayants droit à des établissements d’enseignement de langue officielle minoritaire.

Il faut toutefois noter que des disparités dans les modèles de gestion des commissions scolaires des autres provinces et territoires du Canada pourraient générer des résultats distincts de ceux établis par les tribunaux dans les causes provenant des Territoires du Nord-Ouest ou du Yukon. En effet, certains ressorts dans lesquels le gouvernement accorde une plus grande marge de manœuvre aux commissions scolaires pourraient obliger les tribunaux à préciser leur position sur la question de l’admission des non-ayants droit. Pour une liste exhaustive des différents modèles de gestions des commissions scolaires dans les provinces et territoires canadiens, vous pouvez consulter l’étude d’impact rédigée par Me Mark Power et Me Maxine Vincelette pour la Fédération nationale des conseils scolaires francophones ou le sommaire et financée par le Programme d’appui aux droits linguistiques. 

Poser le regard au-delà du statu quo: analyse de la décision dans l'affaire CSFY

Le jugement rendu par la Cour suprême du Canada dans l’affaire Commission scolaire francophone du Yukon(CSFY) confirme le statu quo et nous annonce que les parties devront tout reprendre à zéro. Même s’il est difficile de dire que cette décision permettra de faire évoluer les droits linguistiques en matière d’éducation au Canada, il est possible d’en dégager quelques points positifs.

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Jugement dans l'affaire Rose-des-Vents

Après une longue et complexe bataille judiciaire, les parents d’enfants francophones de la région de Vancouver en Colombie-Britannique ont eu gain de cause avec le jugement rendu par la Cour suprême du Canada dans l’affaire Rose-des-Vents.

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Comprendre le projet de loi S-205 pour la modernisation de la Loi sur les langues officielles

Cet article a été rédigé par Jasmine Ranger, étudiante à l’Université d’Ottawa et adjointe aux communications au Programme d’appui aux droits linguistiques depuis mai 2014. Fière Franco-Ontarienne depuis l’adolescence, son nouveau poste a éveillé en elle un grand intérêt pour les droits linguistiques. L’étude du projet de loi S-205 est l’un des évènements récents qui ont attiré son attention. Elle a eu envie de le comprendre pleinement et, par la même occasion, de partager ses nouvelles connaissances sur ce blogue.

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Cet article a été rédigé par Jasmine Ranger, étudiante à l’Université d’Ottawa et adjointe aux communications au Programme d’appui aux droits linguistiques mai à décembre 2014. Fière Franco-Ontarienne depuis l’adolescence, son nouveau poste a éveillé en elle un grand intérêt pour les droits linguistiques. L’étude du projet de loi S-205 est l’un des évènements récents qui ont attiré son attention. Elle a eu envie de le comprendre pleinement et, par la même occasion, de partager ses nouvelles connaissances sur ce blogue.

Un petit pas dans la bonne direction pour le projet de loi de la sénatrice Maria Chaput visant à moderniser la Partie IV de la Loi sur les langues officielles (LLO) : il sera étudié par le Comité sénatorial permanent des langues officielles. Peut-on espérer un grand pas pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM) ? Quoi qu’il en soit, il est grand temps de parler de la notion de « demande importante » en matière de services dans la langue officielle minoritaire.

Que seraient les CLOSM sans l’aide des porte-paroles qui les représentent auprès de tous les paliers de gouvernement ? La sénatrice franco-manitobaine, Maria Chaput, est l’une de ces personnes déterminées qui ont à cœur la vitalité des CLOSM et la protection de leurs droits linguistiques. C’est d’ailleurs pour cette raison que, le 23 octobre 2013, elle a déposé le projet de loi S-205. Ce dernier, à condition qu’il soit approuvé, modifiera la Partie IV de la LLO : « Communications avec le public et prestation des services ». Les modifications proposées par la sénatrice Chaput concernent entre autres l’application de la Loi dans certains lieux, la qualité égale des services et des communications dans les deux langues officielles, des consultations avec les minorités francophones et anglophones, de nouveaux critères d’application de la Loi et une révision à chaque recensement.

La ténacité de la sénatrice Chaput est indéniable. S-205 est le troisième projet de loi qu’elle dépose dans le but de moderniser la LLO. Avant lui, l’étude des projets de loi S-220 et S-211 a été interrompue en raison des élections fédérales de 2011 et de la prorogation du Parlement en 2013 respectivement. Ils sont morts au feuilleton, comme on dit dans le jargon parlementaire. Pourtant, S-205 pourrait connaitre un sort différent. En effet, malgré la volonté du gouvernement de référer ce projet de loi au Comité sénatorial permanent des finances nationales, les sénateurs ont pensé qu’il serait mieux étudié sous la loupe du Comité sénatorial permanent des langues officielles.

Tel qu’on pouvait l’imaginer, la sénatrice Maria Chaput est très contente de cette décision, car depuis le début, elle espérait que le projet de loi soit référé au Comité des langues officielles qu’elle juge « très bien outillé ». Selon elle, « tous les sénateurs siégeant au Comité sont bien informés des enjeux. Ce sera un débat positif et constructif. » Que le projet de loi soit étudié par des gens informés était l’une des priorités de la sénatrice. Il faut rappeler qu’en février 2013, S-211 avait été envoyé au Comité sénatorial permanent des finances où il détonnait parmi des questions de budget, de prestations de retraite, etc. La sénatrice Chaput rappelle que « l’objectif de S-205 n’a jamais été d’engendrer des coûts », mais d’aider le gouvernement à mieux répondre aux besoins des CLOSM.

En déposant son projet de loi, la sénatrice Chaput a envoyé un message clair : le gouvernement pourrait faire mieux afin de respecter ses engagements envers les CLOSM. Elle croit que « ce dont nous avons besoin, c’est un régime plus flexible et moins complexe, qui reflète mieux les réalités linguistiques et démographiques du pays ». Elle partage l’opinion de plusieurs en disant que les CLOSM ont beaucoup évolué depuis l’adoption de la LLO et du Règlement sur les langues officielles (RLO). Le nombre de familles exogames augmente sans cesse et de plus en plus d’immigrants francophones s’installent dans les provinces où le français est minoritaire.

En plus du projet de loi, la sénatrice Maria Chaput critique le mode de calcul de la « demande importante* » qui est le fondement même des obligations des institutions fédérales en matière de services et de communications dans les langues officielles. En vertu de l’article 20(1)a de la Charte canadienne des droits et libertés, « le public a, au Canada, droit à l’emploi du français ou de l’anglais pour communiquer avec [les institutions fédérales si l’emploi de cette langue] fait l’objet d’une demande importante ». Cette notion est quant à elle définie dans le RLO.

Selon la sénatrice, « la loi et le règlement actuel donnent une image imprécise et incorrecte de la taille réelle [des CLOSM] ». Pour remédier à ce problème sans pour autant tenter de modifier le RLL, elle propose de modifier une partie de l’article 32(2) de la LLO afin d’obliger le gouverneur en conseil à tenir compte « du nombre de personnes pouvant communiquer dans la langue » de la minorité, ainsi que « de la vitalité institutionnelle […] de la population de la minorité francophone ou anglophone de la région desservie ».

Aux yeux de la sénatrice, la mise en contexte de la vitalité des CLOSM est aussi importante que les données fournies par Statistique Canada quant aux locuteurs des langues officielles. S-205 encourage la participation active des communautés par le biais de consultations, ainsi que des mesures réparatrices dans les régions où les CLOSM sont fragilisées et menacées par une assimilation rapide. Elle considère que le gouvernement ne peut plus se permettre d’attendre et doit agir maintenant afin de protéger ces communautés. « L'attentisme n'a pas fonctionné et ne fonctionne pas davantage aujourd'hui. Si on adoptait de nouveau une telle approche jusqu'en 2021, cela équivaudrait à faire preuve de négligence, et je ne pense [pas] que c'est ce que nous souhaitons », a-t-elle dit lors de la deuxième lecture du projet de loi S-205.

Pour conclure, c’est avec la détermination des uns et l’appui des autres que les communautés de langue officielle en situation minoritaire continueront d’avancer un pas à la fois.

Pour plus de détails:

* La demande importante est basée sur le nombre d'ayants droit qui est définie par la Partie I du Règlement sur les langues officielles.

Un ayant droit est un francophone ou un anglophone selon la définition suivante:

Définition d'un francophone:

  • Doit avoir la connaissance du français;
  • Doit avoir le français comme langue maternelle;
  • Doit parler le français à la maison

Définition d'un anglophone:

  • Doit avoir la connaissance de l'anglais;
  • Doit avoir l'anglais comme langue maternelle;
  • Doit parler l'anglais à la maison.

Lorsque ces trois critères ne permettent pas au gouvernement de déterminer la langue de l'individu, le nombre d'individus qui ne correspondent pas à cette définition d'un francophone ni à celle d'un anglophone, est réparti en parts égales entre la population francophone et la population anglophone pour des fins statistiques.

Le Renvoi sur la réforme du Sénat et les minorités linguistiques

Le 25 avril dernier, la Cour suprême du Canada a rendu un jugement sur les exigences constitutionnelles relatives à une réforme du Sénat. Les huit juges ont conclu de façon unanime que le gouvernement fédéral ne peut pas procéder à une réforme du Sénat sans l’accord des provinces.

La Cour suprême a souligné le rôle historique du Sénat pour la représentation équitable des populations minoritaires, sans lequel les communautés en situation minoritaire ne pourraient pas être représentées compte tenu de leur nombre et du système démocratique populaire.

La Cour a conclu que le Sénat étant une partie de la Constitution canadienne, le gouvernement fédéral ne peut pas l’abolir ou le modifier unilatéralement. Pour procéder à une réforme du Sénat, le gouvernement doit respecter les procédures de modifications constitutionnelles prévues dans la partie V de laLoi constitutionnelle de 1982 adoptée lors du rapatriement de la Constitution.

Pour plus de détails sur cette cause,consultez:

Le jugement disponible en ligne

http://scc-csc.lexum.com/scc-csc/scc-csc/fr/item/13614/index.do

Les mémoires déposés par les intervenants disponibles en ligne

http://www.scc-csc.gc.ca/case-dossier/info/fac-mem-fra.aspx?cas=35203

Voir aussi le texte du professeur Benoît Pelletier: « Réponses suggérées aux questions soulevées par le renvoi à la Cour suprême du Canada concernant la réforme du Sénat » (2013), 43R.G.D.445., disponible en ligne, Érudit:http://www.erudit.org/revue/rgd/2013/v43/n2/1023203ar.pdf

Guylaine Loranger conseillère juridique etMarie-Hélène Haché étudiante en droit– PADL 30 avril 2014

La francophonie ontarienne

Pour ceux qui doutent de la vitalité de la communauté franco-ontarienne, vous êtes loin de la réalité! Je suis Marie-Eve Bourgault et je travaille comme rédactrice étudiante pour le PADL, auprès duquel j’apprends à connaître les droits linguistiques constitutionnels et les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada. Je suis récemment partie à la découverte de la communauté francophone en Ontario et je dois avouer, j’en ai encore beaucoup à apprendre.

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Entrevue avec Denis Vaillancourt 

Ceci est le premier billet d’une série en trois parties sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire par Marie-Eve Bourgault, étudiante du PADL en 2013, qui est maintenant diplômée du programme de traduction de l’Université d’Ottawa.

Pour ceux qui doutent de la vitalité de la communauté franco-ontarienne, vous êtes loin de la réalité! Je suis Marie-Eve Bourgault et je travaille comme rédactrice étudiante pour le PADL, auprès duquel j’apprends à connaître les droits linguistiques constitutionnels et les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada. Je suis récemment partie à la découverte de la communauté francophone en Ontario et je dois avouer, j’en ai encore beaucoup à apprendre. J’ai d’ailleurs eu l’occasion de discuter avec Denis Vaillancourt, le président de l’organisme porte-parole de la communauté des Franco-ontariens, l’Assemblée des francophones de l’Ontario (AFO), afin de découvrir de quelles façons ceux-ci s’approprient leurs droits linguistiques et comment ces droits sont reflétés dans le mandat de l’AFO. M. Vaillancourt a chaleureusement répondu à toutes mes questions avec passion et conviction.

Nous avons premièrement discuté des moyens que prenait l’AFO pour contribuer à l’avancement des droits linguistiques des francophones. En ce sens, l’objectif principal de l’AFO est de protéger la langue française en Ontario. L’Assemblée sert donc de représentante auprès des élus provinciaux et fédéraux et cherche à établir des liens avec les gouvernements afin de faire connaitre et de revendiquer les priorités de la francophonie. De plus, elle appuie des groupes et organismes locaux œuvrant pour les Franco-ontariens.

Nous avons ensuite parlé de la Franconnexion—le Symposium des langues officielles, un rassemblement de discussion sur la francophonie ontarienne, qui s’est tenu du 24 au 26 octobre dernier. Ce forumouvert au public a lieu tous les deux ou trois ans et permet à différents organismes et aux communautés de la province de se faire connaître et d’établir un réseau intéressant. La Franconnexion est l’occasion de réaliser que malgré son statut minoritaire, la communauté francophone de l’Ontario rejoint bien plus de gens que l’on pourrait penser. L’évènement veut briser l’isolement des Franco-ontariens, leur faire réaliser qu’ils ne sont pas seuls, et établir des liens solides pour continuer l’innovation d’idées dans la revendication des priorités de la francophonie ontarienne.

M. Vaillancourt a d’ailleurs insisté sur ces priorités : l’éducation, l’élargissement des services et des communications dans plusieurs domaines, dont la santé, et la modification du statut du commissaire aux services en français de l’Ontario comme indépendant. Il voudrait que celui-ci agisse comme agent des législatures en ce qui concerne les langues officielles et les droits linguistiques afin de mieux informer les citoyens. De plus, selon lui, il devrait y avoir des droits de gouvernance universitaires pour les francophones. Bien qu’il y ait des universités bilingues, il n’y en a aucunes qui soient strictement francophones en Ontario. En ce qui concerne les services et les communications en français, il affirme qu’il est facile d’y avoir accès dans les 25 régions désignées francophones. Il reconnait cependant qu’il y a place à amélioration, notamment dans les zones non désignées où les services en français sont plus difficiles à trouver.

Par la suite, nous avons abordé les influences qu’on eut les droits linguistiques sur le développement global de la communauté franco-ontarienne. Il a entre autres fait mention de la Loi constitutionnelle de 1982, qui reconnait le français et l’anglais comme des langues à valeur égale, et que les droits linguistiques ont permis d’assurer la vitalité de la communauté et de légitimer la présence d’une deuxième langue officielle dans la société. Le défi actuel des Franco-ontariens, d’après M. Vaillancourt, est de s’assurer qu’ils aient ce qu’il appelle le « réflexe franco », c’est-à-dire le réflexe de demander activement leurs services en français partout, et de l’encouragement à se servir de leur langue. L’idéal serait que l’Ontario obtienne un statut bilingue.

Quand je lui ai demandé si les des droits linguistiques avaient eu une incidence sur l’identité culturelle et le bilinguisme des Franco-ontariens, « Absolument » m’a-t-il répondu sans hésitation. Selon lui, la notion des droits linguistiques est un maillon essentiel à la construction et au maintien de cette identité. Ils ont permis de donner un sentiment d’appartenance à la communauté franco-ontarienne par la présence du français dans les appareils gouvernementaux. Il voudrait, idéalement, que les droits linguistiques soient un acquis, que les deux langues aient une place égale et que leur usage soit normalisé dans la société ontarienne.

En conclusion, M. Vaillancourt reste optimiste quant à l’avenir de la francophonie en Ontario. Il considère qu’il y a eu beaucoup d’avancée, surtout à la suite du grand déploiement pour ne pas fermer l’hôpital Montfort en 1998. Il concède cependant qu’il reste du travail à faire et qu’il faut continuer à encourager la communauté francophone à faire usage de sa langue, à prévaloir ses droits acquis et à affirmer sa présence par le « réflexe franco ». Comme l’a déclaré le directeur général de l’AFO, Peter Hominuk, lors de son discours à la Franconnexion : « Ça fait 400 ans qu’on nous dit que la communauté franco-ontarienne va disparaître. Aujourd’hui, nous sommes toujours là et plus forts que jamais! »

 

-- Marie-Eve Bourgault, étudiante en rédaction aux communications

06/11/2013

L'Alberta en français

Après mon entrevue avec Denis Vaillancourt, qui m’a permis de mieux comprendre la francophonie en Ontario, j’ai décidé de poursuivre dans cette voie pour assouvir mon désir de connaître les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada. Cette fois, j’ai voulu avoir l’opinion d’un membre d’une de ces communautés plutôt que d’un organisme.

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Entrevue avec Stéphane Erickson

Ceci est le deuxième billet d’une série en trois parties sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire par Marie-Eve Bourgault, une étudiante du PADL en 2013, qui est maintenant diplômée du programme de traduction de l’Université d’Ottawa.

Après mon entrevue avec Denis Vaillancourt, qui m’a permis de mieux comprendre la francophonie en Ontario, j’ai décidé de poursuivre dans cette voie pour assouvir mon désir de connaître les communautés de langue officielle en situation minoritaire au Canada. Cette fois, j’ai voulu avoir l’opinion d’un membre d’une de ces communautés plutôt que d’un organisme.

Après m’être familiarisée un peu avec la cause Caron*, j’ai jeté mon dévolu sur l’Alberta. J’ai donc communiqué avec Stéphane Erickson,  un étudiant au Programme en droit canadien, à la fin duquel il obtiendra deux diplômes, la Licence en droit civil (LL.L) et un Juris Doctor en common law (J.D.), à l’université d’Ottawa, pour qu’il puisse me parler de la communauté franco-albertaine. Originaire d’Edmonton, il s’est établi à Ottawa afin de poursuivre ce programme et il écrit en plus un mémoire de recherche portant sur la constitutionnalité du Règlement sur les langues officielles. Il a réussi à répondre à toutes mes questions dans un langage simple et avec une dévotion contagieuse.

J’ai d’abord voulu en apprendre un peu sur lui et sur ce qui l’a attiré dans le domaine du droit, particulièrement dans le domaine des droits linguistiques. Né d’un couple exogame (anglais- français), c.-à-d. que les parents n’ont pas la même langue maternelle, il a majoritairement été instruit en français, possédant notamment un Baccalauréat bilingue en administration des affaires du Campus St-Jean de l’Université de l’Alberta. C’est son professeur et politologue, le très renommé Edmund Aunger, qui l’a inspiré à poursuivre ses études en droit et qui l’a sensibilisé aux droits linguistiques. Il a ensuite justifié son choix en me résumant l’histoire linguistique de l’Alberta où, vers la fin du 19e siècle, le français était majoritaire avant d’être presque perdu au profit de l’anglais. La situation ne s’améliore qu’à l’élaboration de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés de 1982 qui oblige, entre autres, le gouvernement albertain à donner et à financer l’éducation en français pour la minorité francophone. Ceci dit, Stéphane voudrait continuer à faire valoir les droits linguistiques en Alberta.

Il m’a ensuite parlé de son mémoire dont l’objectif est d’élargir la définition de francophone pour qu’elle englobe non seulement ceux dont la langue maternelle est le français, mais également les francophiles. Ce qu’il faut savoir c’est que le public a droit à des services dans la langue de la minorité de langue officielle là où la demande est importante, mais que cette demande  est définie en grande partie d’un point de vue statistique et que la définition de francophone repose sur trois critères qui s’additionnent en commençant par celui de langue maternelle française. L’argument de Stéphane est que les services doivent être offerts à tout le public, autant les francophones de souche que les francophiles, mais qu’il existe très peu de jurisprudence ou de règlement en cour à ce sujet. Il soutient ainsi que l’historique devrait être accepté comme argument juridique et non comme strictement politique. Selon Stéphane, les tribunaux regardent toujours dans l’histoire pour traiter des droits linguistiques, car ceux-ci sont nés de compromis et il serait une erreur de considérer l’historique comme preuve non valable d’un point de vue juridique.

Après ses deux réponses qui ont suscité une grande passion chez mon interlocuteur, je lui ai demandé si les droits linguistiques avaient eu une influence sur le développement global et l’épanouissement de la communauté franco-albertaine. Il m’a répondu que sans la Charte, la communauté actuelle serait beaucoup plus petite. Celle-ci compte environ 75 000 francophones, mais plus de 250 000 personnes en Alberta sont d’expression française. D’un point de vue culturel, la revendication des droits linguistiques donne un sentiment d’appartenance à leur communauté et leur a permis de continuer d’exister.

Pour le prochain point, Stéphane n’a pas hésité à se prononcer sur l’importance du bilinguisme des juges à la Cour Suprême. Selon lui, il s’agit justement d’une question de droit linguistique constitutionnel qui nous offre la liberté d’utiliser la langue officielle de notre choix dans les cours fédérales. Cependant, la Cour Suprême n’est pas soumise à ce droit constitutionnel. Pourquoi? Nul ne le sait. Il s’agit également, en ce sens,  d’une justice fondamentale. Au fédéral, les lois ne sont jamais traduites, mais corédigées, ce qui amène des nuances d’une version à une autre. Comment ainsi un juge unilingue peut-il comprendre les deux versions des lois, s’interroge Stéphane? La réponse est simple, il ne peut pas. Selon lui, la langue devrait être une compétence obligatoire et non juste une option.

Quand je lui ai demandé s’il était possible d’avoir accès à des services et des communications en français en Alberta, il m’a répondu qu’il y en avait au niveau fédéral, dans certaines régions officieusement francophones à Edmonton et au nord de la province. Il a donné comme exemple les services de santé et les services privés où l’offre est active, bien qu’elle ne soit pas régie par une loi. Il affirme que l’on doit savoir où ces services sont offerts, mais qu’il est possible de vivre en français en Alberta. Il est peu probable qu’il y ait des améliorations puisque les droits linguistiques sont beaucoup moins politisés en Alberta qu’en Ontario, a-t-il précisé.

Il a terminé en disant que nous devons avoir le réflexe de demander nos services en français et qu’il s’envolera pour l’Espagne prochainement pour se lancer dans le droit européen.

Ce que j’ai retenu de cet entretien? Que j’ai eu tort de croire que le français n’existait pas ailleurs au Canada et que bien que minoritaire, il est bel et bien là et que les communautés francophones sont plus que soudées pour faire valoir leurs droits linguistiques.

 

-- Marie-Eve Bourgault, étudiante en rédaction aux communications

21/11/2013

 

La communauté de langue anglaise au Québec

M’ayant trouvé un intérêt pour la rédaction de blogues destinés à la découverte des communautés de langue officielle en situation minoritaire, j’étais plus qu’excitée à l’idée de retenter l’expérience. Après avoir eu la chance d’avoir un aperçu des communautés francophones de l’Ontario et de l’Alberta, j’ai voulu découvrir la communauté de langue anglaise du Québec. Comme pour mes blogues précédents, j’ai voulu savoir comment les Québécois d’expression anglaise s’approprient leurs droits linguistiques et comment ceux-ci sont reflétés dans le mandat de l’organisme porte-parole de la communauté, le Quebec Community Groups Network(QCGN).Ainsi, j’ai eu la chance de parler avec Madame Sylvia Martin-Laforge,directrice générale de QCGN, qui a accepté de répondre à mes questions.

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Entrevue avec Sylvia Martin-Laforge

Ceci est le deuxième billet d’une série en trois parties sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire par Marie-Eve Bourgault, une étudiante du PADL en 2013, qui est maintenant diplômée du programme de traduction de l’Université d’Ottawa.

M’ayant trouvé un intérêt pour la rédaction de blogues destinés à la découverte des communautés de langue officielle en situation minoritaire, j’étais plus qu’excitée à l’idée de retenter l’expérience. Après avoir eu la chance d’avoir un aperçu des communautés francophones de l’Ontario et de l’Alberta, j’ai voulu découvrir la communauté de langue anglaise du Québec. Comme pour mes blogues précédents, j’ai voulu savoir comment les Québécois d’expression anglaise s’approprient leurs droits linguistiques et comment ceux-ci sont reflétés dans le mandat de l’organisme porte-parole de la communauté, le Quebec Community Group Network (QCGN)Ainsi, j’ai eu la chance de parler avec Madame Sylvia Martin-Laforge,  directrice générale de QCGN, qui a accepté de répondre à mes questions.

J’ai d’abord voulu savoir comment QCGN fait avancer les droits linguistiques des Québécois d’expression anglaise. J’ai appris que l’organisme a pour objectif d’identifier et d’aborder des questions stratégiques ayant des conséquences sur le développement des communautés d’expression anglaise. Selon Mme Martin-Laforge, les problèmes qui ressortent le plus sont l’accès à des services et aux communications en anglais et aussi à l’éducation. Bien qu’il existe des établissements d’enseignements de langue anglaise au Québec, les lois linguistiques particulières au Québec font que seuls les élèves dont les parents sont citoyens canadiens, et anglophones, y ont accès. En effet, à l’origine, La Charte de la langue françaisede 1977 prévoyait le droit à l’instruction de langue anglaise non pas aux parents ayant reçu leur instruction en anglais au Canada, mais seulement à ceux l’ayant reçu au Québec. Cet article de La Charte était intitulée  la «clause Canada». Cette clause a été modifiée à la suite de l'adoption de la Loi constitutionnelle de 1982, qui définit le droit de l'éducation des minorités de langue française et anglaise dans toutes les provinces selon l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. La « clause Canada » a été utilisé par le gouvernement du Québec jusqu’en 1993. En fait, la «clause Canada» a été remplacée par la «clause Québec», ce qui signifie que le droit reconnu à l'éducation de langue anglaise a été étendue à tous les citoyens canadiens.

QCGN travaille donc pour que les élèves issus de familles immigrantes puissent avoir accès à une éducation en anglais au Québec. De plus, QCGN s’est opposé au Projet de loi 14, qui avait pour objectif de renforcer les politiques linguistiques du Québec.

Par la suite, puisque je connaissais très peu la communauté de langue anglaise du Québec, j’ai voulu savoir si leur situation ressemblait à celle des francophones ailleurs au Canada. Selon Mme Martin-Laforge, les principales différences résident dans la diversité et dans les institutions scolaires. Entre autres, la communauté est très diversifiée des côtés ethnique et religieux. On y compte notamment des individus d’origine juive, africaine, asiatique, grecque et bien d’autres. De par sa grande diversité, la communauté anglophone du Québec est beaucoup plus multiculturelle que les francophones et leur taux de bilinguisme est également plus élevé.

La plus grande priorité de QCGN, en ce qui a trait aux droits linguistiques, est le respect des droits linguistiques constitutionnels et de la Loi sur les langues officielles, particulièrement dans le cadre de la réglementation et de la législation. Cette loi est importante pour la communauté de langue anglaise, car il n’y a pas de loi semblable à celle sur les services en français en Ontario qui adresse les besoins de la communauté de langue anglaise minoritaire. D’ailleurs, selon Mme Martin-Laforge, dans la description de la Loi 101 au Québec, la définition d’Anglo-Québécois est très restreinte. QCGN travaille donc à étendre cette définition pour y compter les anglophiles ainsi que les immigrants anglophones.

Lorsque je lui ai demandé si les droits linguistiques avaient eu une influence sur le développement global et l’épanouissement des communautés anglophones du Québec, Mme Martin-Laforge n’a pas hésité à me répondre que la langue représente encore aujourd’hui une grande barrière pour les anglophones du Québec, particulièrement quand vient le temps d’une recherche d’emploi ou d’un avancement professionnel. La mise en place de la Loi 101 a convaincu plusieurs personnes de s’exiler du Québec et de s’installer ailleurs. D’après Mme Martin-Laforge, seuls les Québécois de naissance y sont restés.

Mme Martin-Laforge n’a pas hésité à affirmer que les droits linguistiques, particulièrement au Québec, ont eu des conséquences sur l’identité culturelle et le bilinguisme de la communauté anglophone québécoise. Il est vrai que les lois linguistiques du Québec ne sont pas en leur faveur et qu’il est difficile, pour une jeune anglophone du moins de la « génération Y », de s’identifier à sa communauté quand il ne se sent pas à l’aise et qu’on ne l’encourage pas à s’exprimer en anglais, selon elle.

En ce qui concerne l’accessibilité des services et des communications en anglais au Québec, Mme Martin-Laforge affirme que ce n’est pas pareil partout. Il est très facile de communiquer en anglais avec le gouvernement fédéral, puisque celui-ci est obligé de fournir ses services dans les deux langues officielles. Dans un contexte provincial, il est particulièrement plus facile d’avoir accès à des services et des communications en anglais dans la région de Montréal. Il est par contre plus difficile d’en trouver à l'extérieur de la métropole.

Pour conclure l’entrevue, j’ai demandé à Mme Martin-Laforge ce qu’elle espérait pour l’avenir des communautés d’expression anglaise au Québec. Elle m’a répondu qu’elle voudrait plus d’ouverture et de soutien de la part du gouvernement provincial, que ce soit par des législations, des réglementations, etc. Elle voudrait également que les communications en anglais en général, dans un contexte qui concerne la langue anglaise, soient plus faciles.

En toute fin, elle voudrait pouvoir sensibiliser les jeunes francophones et leur faire comprendre la situation et les enjeux de la communauté anglophone du Québec. De mon entretien avec Mme Martin-Laforge, je peux affirmer que je connais maintenant mieux cette communauté qui ne veux finalement que faire valoir leurs droits linguistiques.

-- Marie-Eve Bourgault, étudiante en rédaction aux communications

31/01/2014

Etudes d'impact

Les études d’impact sont rédigées par une personne, un groupe ou un organisme à but non lucratif qui a pour objectif d'entreprendre une étude juridique sur l’influence qu’un projet de loi, une loi, un projet de modification constitutionnelle ou l’effet d’une décision juridique concernant les droits linguistiques constitutionnels a sur les communautés de langue officielle au Canada.

Chacune des études a été rédigée dans la langue choisie par leurs auteurs, soit l’anglais ou le français.  Le PADL a préparé un résumé de chaque étude dans la langue officielle autre que celle dans laquelle l’étude est rédigée, pour les lecteurs qui désirent comprendre l’essentiel de l’étude dans cette autre langue officielle.  En général, la version complète de l’étude est seulement disponible dans la langue dans laquelle elle a été rédigée. Cependant, dans certaines circonstances, il est possible que l’étude soit disponible dans les deux langues officielles.

Les études d’impact suivantes ont été financées par le PADL dans le cadre de son volet « Information et Promotion ».

Études d’impact récentes

L’application de l’article 16(1) de la Loi constitutionnelle, 1982 et la partie VII de la Loi sur les langues officielles, LRC 1985, c 31à l’égard de la communauté d’expression anglaise du Québec 
« Jusqu'à ce qu’il plaise à la Reine d’en ordonner autrement… » : l’obligation positive du gouvernement du Canada de favoriser et promouvoir l’égalité des langues officielles à la Ville d’Ottawa
Recension de certaines dispositions octroyant, limitant ou niant les pouvoirs de gestion et de contrôle en matière de sites et d’établissements scolaires des conseils, commissions et divisions scolaires de langue française dans les provinces et territoires canadiens
L’héritage de la décision R. c. Beaulac

 

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Archives Etudes d'Impact

Archives

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L’obligation des institutions fédérales de consulter les communautés linguistiques officielles en situation minoritaire

Droits relatifs aux foyers de soins de longue durée francophones au Nouveau-Brunswick

Loi modifiant la Loi électorale du Canada et d’autres lois et modifiant certaines lois en conséquence («Loi modifiant la Loi électorale au Canada»)

La Constitution et la langue anglaise au Québec : L'éducation, la primauté de la langue française et les droits collectifs

Gestion scolaire et habilitation des communautés minoritaires de langue officielle au Canada

Étude d'impact du projet de loi S-12 (L’incorporation par renvoi)

Quelle autonomie pour les francophones hors Québec ? Le point de vue des dispositions linguistiques de la Charte

Langueset justice

Mise en place d’un réseau de garderies et de CPE de langue française hors Québec – Les obligations du gouvernement fédéral

Impact Study Report by the Bill 104 Committee of the Quebec Association of Independent Schools

Réflexions sur la portée de la décision R c. Rémillard (R.) et al., 2009 MBCA 112 - 2012

De la possibilité d'être compris directement, à l'oral comme à l'écrit, sans l'entremise de services d'interprétation ou de traduction par les juges de la Cour suprême du Canada - 2012

Constitutional Protection for English Language School Boards in Quebec – Who Has Management and Control? - 2011

Analyse préliminaire du projet de loi C-7, Loi concernant la sélection des sénateurs et modifiant la loi constitutionnelle de 1867 relativement à la limitation de la durée du mandat des sénateurs 2011

Evaluating Nguyen v Quebec, [2009] 3 S.C.R. 208 and Bill 115: Section 23 of the Canadian Charter 2011

Projet de loi C-455 – Loi modifiant le Code canadien du travail (langue française) - 2011

Can the Notwithstanding Clause Override Section 23 of the Canadian Charter of Rights and Freedoms? - 2010

Bill 103: Collective Rights and the declining vitality of the English-speaking communities of Quebec - 2010

Étude d'impact juridique concernant l'affaire DesRochers c. Canada (Industrie), [2009] 1 S.C.R. 194 - 2010

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