Un innovateur intercontinental
Par Kyle Bournes
La journée de travail commence à peine au Canada lorsque je joins Raj Narula (B.Sc.A. en génie mécanique, 1980) à New Delhi, par FaceTime.
Quelque peu troublé par le bourdonnement d’activité en arrière-plan et la différence de fuseau horaire, je lui explique qu’il s’agit de mon premier appel téléphonique en Inde. Il accueille ma remarque avec un petit rire : communiquer d’un continent à l’autre est pour lui une réalité quotidienne.
Il est 18 h 30 à New Delhi. Raj Narula vient d’arriver dans le pays de sa naissance pour un autre voyage d’affaires. Il a acquis au Canada comme en Inde la réputation d’être la personne à voir quand il s’agit d’aider les entreprises technologiques canadiennes à percer le marché indien.
Tout a commencé pour lui il y a une quinzaine d’années lorsqu’il a pris les rênes d’une société canadienne de technologie qui était au bord de la faillite. Là où beaucoup n’auraient vu qu’un navire en train de couler, lui a vu l’occasion de frapper un grand coup. Grâce à ses relations en Inde, il a réussi à rebâtir l’entreprise en question. Son flair a porté ses fruits, puisque peu de temps après, elle était rachetée par une société indienne.
Raj Narula a alors saisi tout l’intérêt d’aider la technologie et l’innovation canadiennes à s’introduire en Inde. Peu après, il fondait avec un collègue la société TaraSpan, laquelle moins de cinq ans plus tard avait vu son personnel passer de deux à 150 personnes et s’était imposée comme un chef de file auprès des entreprises mondiales désireuses de pénétrer l’énorme marché indien. Des géants de la technologie comme Ericsson, IBM, Amdocs et Mitel ont ainsi eu recours à ses services. À l’été 2014, Raj Narula décidait de quitter TaraSpan afin de se consacrer à de nouveaux projets. Entre-temps, il continue de diriger des délégations commerciales en Inde, permettant ainsi à de nombreuses sociétés et à quelques universités canadiennes d’y mettre le pied pour la première fois.
Quand on lui demande : « Pourquoi l’Inde? », il répond que c’est parce que ce pays représente un marché en croissance rapide et en constante évolution.
Bien que plus important, le marché chinois comporte, explique-t-il, de nombreuses barrières, par exemple la langue. L’Inde, par contraste, offre un marché essentiellement orienté vers les services, auquel l’accès est facilité par le fait que l’anglais est une des langues officielles du pays. De plus, la diaspora indienne, nombreuse et présente partout dans le monde, compte certains des acteurs clés du marché mondial de la technologie.
Enfin, souligne-t-il, l’Inde constitue l’un des plus importants marchés au monde pour le téléphone cellulaire. Les appareils Android y occupent de loin la plus grande place, en raison de leur coût modique, si bien que les appareils roulant sous iOS (iPhones et iPads) y sont beaucoup moins courants qu’en Amérique du Nord.
Le plus récent objectif que s’est fixé Raj Narula consiste à instaurer entre le Canada et l’Inde des liens axés sur l’éducation. Le gouvernement indien a confié à la National Skills Development Corporation (Société nationale de développement des compétences) la mission de former plus de 150 millions de personnes d’ici 2022. Or, Raj Narula est actuellement membre du conseil d’administration de SKILLSdox, une société qui vise à mettre en relation, par la formation en ligne, les leaders canadiens du monde de l’éducation et le marché indien. Il a aussi mis sur pied InCa Synergies, une société qui se propose de combiner la formation et l’innovation à l’aide d’une méthode d’apprentissage mixte.
« Nous introduisons certains des meilleurs logiciels canadiens sur les marchés émergents en y ajoutant un niveau élevé de contenu local ainsi que du soutien sur place, afin que nos solutions bénéficient d’une expertise en temps réel », dit-il. « Par exemple, nous avons récemment mis au point une plateforme unique en son genre pour l’évaluation des employés occupant des postes de niveau débutant dans les centres d’appel. »
Raj Narula est par ailleurs membre actif du conseil d’administration de l’Association des diplômés de l’Université d’Ottawa. Il a fait profiter l’Université de ses précieux conseils sur les moyens d’établir une présence en Inde. Il est également cofondateur de la section d’Ottawa de TiE, un réseau mondial regroupant des entrepreneurs de 55 pays. Comme son père était diplomate de carrière et que sa famille était appelée à déménager tous les trois ans, Raj Narula a grandi dans des villes comme Téhéran, New Delhi, Rome et Georgetown, avant d’arriver à Ottawa à l’adolescence. Il parle de nombreuses langues et a voyagé dans plus de 50 pays.
« Mon père est une source d’inspiration pour moi », dit-il. « Il nous a appris qu’on peut fonctionner dans n’importe quel pays du monde du moment qu’on en respecte la population et la culture et qu’on sait s’adapter à des circonstances nouvelles. »
Comme si toutes ces entreprises ne suffisaient pas, Raj Narula a lancé avec son frère Ravi, en 1984, le restaurant indien Haveli, installé dans le Marché By, à Ottawa, où il est encore en activité 31 ans plus tard. Sa famille a aussi contribué, en 2006, à la mise sur pied de l’activité caritative « Le bal du Maharaja ».
Innovateur infatigable, esprit doué pour la résolution de problèmes et, bien entendu, ingénieur, Raj Narula a récemment été choisi par la Faculté de génie comme lauréat du prix d’excellence de l’Association des diplômés pour 2015.