Vieillir en demeurant actif

Louise Plouffe debout dans le hall d’un edifice à l’Université d’Ottawa

« Je me suis aperçue que les problèmes étaient très semblables partout dans le monde. On se pose partout les mêmes questions sur les soins, la santé et l’aide sociale; la différence, on la constate dans l’urgence des besoins. »

– Louise Plouffe

Par Mike Foster

Si vous consacrez l’ensemble de votre carrière au vieillissement, il est peut-être normal que vous ne preniez jamais vraiment votre retraite.

Techniquement, Louise Plouffe (B.A. 1974, études religieuses; M.A. 1977, psychologie et Ph.D. 1983, psychologie,) a pris sa retraite en 2012. Elle était alors analyste de recherche et gestionnaire à l’Agence de la santé publique du Canada.

Toutefois, son expérience à la conception du Projet mondial des villes-amies des aînés de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) — touchant 100 millions de personnes dans 28 pays — l’a entraînée vers son premier emploi postretraite. En 2013, elle s’est jointe au Centre international sur la longévité du Brésil en tant que chercheuse principale.

Elle est maintenant de retour à son alma mater en tant que directrice de la recherche d’ILC-Canada, centre de réflexion qui se penche sur les enjeux de la longévité et des changements démographiques. Rattaché à la Faculté des sciences de la santé de l’Université, ce nouveau centre, qui est l’un des 17 membres du réseau mondial ILC Global Alliance, se porte à la défense des besoins et des droits des personnes âgées. Il fait la promotion de politiques sur le vieillissement de la population fondées sur des données probantes.

« J’étais très heureuse de revenir à l’Université d’Ottawa », dit-elle.

Un manque de connaissances

Après avoir obtenu sa maîtrise en psychologie, Louise Plouffe a travaillé à l’unité psychogériatrique de l’Hôpital Royal Ottawa et a tôt fait de constater qu’elle avait beaucoup à apprendre : « Mes connaissances étaient nettement insuffisantes, tout comme celles du domaine d’ailleurs. C’était un tout nouveau domaine en pleine évolution. »

En faisant passer des tests psychologiques à des personnes de plus de 75 ans, par exemple, elle a consulté les manuels des tests et constaté qu’il n’existait pas de normes pour ce groupe d’âge. « Nous prenions vraiment des risques en essayant d’interpréter des tests psychologiques réalisés sur des gens de ce groupe », dit-elle.

Elle s’est inscrite au doctorat, mais rares étaient les cours de psychologie du vieillissement au troisième cycle. Elle a donc combiné des cours à l’Université d’Ottawa et à l’Université Carleton pour créer son propre programme de doctorat. Pour sa thèse sur la psychophysiologie cognitive de l’apprentissage, l’attention et la mémoire chez les personnes âgées, elle se dit très redevable à son directeur, le professeur Robert Stelmack.

Une fois son doctorat en poche, elle a fait des études postdoctorales à l’Université Carleton, puis travaillé quatre années à l’Université du Québec en Outaouais, où elle a enseigné les fondements de la gérontologie et de la psychologie du vieillissement dans les programmes de sciences infirmières et de travail social.

De la recherche à la politique

En 1989, elle est devenue membre du Conseil consultatif national sur le troisième âge du gouvernement fédéral à titre de « courtière du savoir », pour aider les chercheurs à faire connaître leur travail aux décideurs. Au Conseil, elle s’est également attachée à faire en sorte que les résultats d’une vaste initiative, le Programme de recherche pour l’autonomie des aînés, servent vraiment à éclairer les politiques.

Puis, en 2005, l’OMS l’a recrutée pour diriger son projet des villes-amies des aînés. Louise Plouffe a établi les paramètres du projet et créé un réseau d’universitaires, de chercheurs et d’organisations de la société civile pour y travailler.

Le produit phare du projet était un guide simple sur l’adaptation des milieux urbains aux besoins, aux préférences et aux capacités des personnes âgées. L’idée derrière ce projet : amener les municipalités à consulter leurs aînés et à réunir leurs forces internes pour concevoir leurs propres solutions. Des exemples de solutions simples pourraient être de trouver des chauffeurs bénévoles pour reconduire les personnes âgées à leurs rendez-vous, ou de former des groupes d’aînés pour tester la sécurité des piétons sur les trottoirs et aux passages à niveau.

Au moment de son lancement, le projet reposait sur l’expérience de personnes âgées de 33 villes de 22 pays. Il portait notamment sur l’état des rues et des parcs, le logement, le transport et les services publics, ou encore la participation à la vie sociale, citoyenne et récréative. L’Agence de santé publique du Canada a fourni environ 600 000 $ en financement de démarrage pour transposer le projet Villes amies des aînés au Canada et dans les pays en développement.

Pertinence mondiale

Louise Plouffe se souvient à quel point elle était ravie de voir son travail se propager si rapidement à l’échelle internationale.

« Je me suis aperçue que les problèmes étaient très semblables partout dans le monde, dit-elle. On se pose partout les mêmes questions sur les soins, la santé et l’aide sociale; la différence, on la constate dans l’urgence des besoins. Je me suis aussi rendu compte qu’il y avait toutes sortes de solutions novatrices à petite échelle dans les pays en développement. »

Elle est reconnaissante à l’OMS d’avoir accordé une visibilité mondiale à ces enjeux : « Une politique ou une directive qui vient de l’OMS a presque autant de poids que si elle émanait d’un Vatican de la santé; elle reçoit beaucoup d’attention. »

Les projets pilotes au Canada sont vite devenus des programmes provinciaux, d’abord en Colombie-Britannique, au Manitoba, au Québec et en Nouvelle-Écosse. En 2008, la ville de Sherbrooke a testé le système, et la ministre québécoise de la Famille et des Aînés, Marguerite Blais, en a fait la pierre angulaire de la première politique de la province sur le vieillissement. À ce jour, 900 villes au Canada, dont Ottawa ainsi que plus de 700 autres au Québec, ont adopté le projet Villes amies des aînés.

« Ça fonctionne parce qu’on réunit à l’échelon local tous les acteurs qui travaillent ensemble à résoudre les problèmes », explique Louise Plouffe.

Dans le monde, deux personnes atteignent 65 ans chaque seconde. On estime qu’en 2031, 23 % des Canadiens (ou 9,6 millions de personnes) auront 65 ans ou plus. De telles statistiques montrent bien l’importance de prendre des mesures maintenant pour se préparer à cette longévité accrue. Elles nous portent également à penser que Louise Plouffe a encore beaucoup de pain sur la planche dans son nouveau rôle à ILC-Canada.

Photo principale
Louise Plouffe est de retour à son alma mater en tant que directrice de la recherche d’ILC-Canada, centre de réflexion qui se penche sur les enjeux de la longévité et des changements démographiques. Photo : Bonnie Findley.

Group of around 20 people in an auditorium, some with their hands raised, in front of a panel of four people, including Louise Plouffe, on a stage.

 

Les participants d'un symposium international sur les Villes amies des aînés tenu à Brasília, Brésil, en octobre 2015. Louise Plouffe est au centre à l’arrière

 

 

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