Une belle plage au sable doré et doux.
Ils méritent mieux que l'espoir d'un avenir meilleur...

Emilie, Maîtrise en développement international et mondialisation
Pays de stage : Côte d'Ivoire
ONG canadienne: UNAC
ONG locale : UNDP 

Après trois semaines de stage, j'ai du mal à assimiler toutes les informations sur la réalité socio-politique et économique du pays, sur la manière dont le projet sur lequel je vais travailler s'inscrit dans cette réalité, sur la structure de l'ONU, son mandat, les mesures prises par le pays pour améliorer son IDH, les défis du développement... tout cela en plus de devoir m'adapter à des tâches quotidiennes qui semblent banales.

Ce qui avait commencé comme une tentative de me vider la tête à la plage pendant un week-end s'est transformé en une prise de conscience décourageante lorsque j'ai eu l'occasion de discuter avec un jeune footballeur qui attend actuellement les résultats d'une compétition en Chine pour pouvoir jouer dans son équipe. À seulement 22 ans, il est devenu le principal responsable de ses deux jeunes frères et sœurs, leurs parents étant décédés. Sa capacité à s'occuper de ses frères et sœurs dépend des opportunités qu'il trouvera à l'étranger. Si sa carrière semble lui offrir des opportunités intéressantes à l'étranger, la réalité économique est bien différente dans son pays.

À une autre occasion, un jeune chauffeur Yango (l'équivalent local d'Uber) explique qu'il a fait des études supérieures en commerce, mais qu'il ne parvient pas à trouver un emploi. Son oncle, titulaire d'un master en informatique, a également du mal à trouver un emploi dans son domaine. Il conclut que les rares emplois formels et sûrs qui existent sont réservés aux riches et aux puissants.

Il semble y avoir une tendance dans les discussions que j'ai avec les jeunes (moins de 35 ans), qui représentent 75 % de la population du pays, et les statistiques confirment cette réalité. Le taux de chômage des jeunes âgés de 15 à 34 ans est plus de deux fois supérieur à la moyenne nationale. Malheureusement, ce n'est qu'un aspect du problème. Beaucoup de jeunes qui ont un emploi sont confrontés à des conditions de travail précaires dans l'économie informelle, occupant souvent des emplois instables et inférieurs à leurs qualifications. Il convient également de noter que je suis basé dans le centre économique de la Côte d'Ivoire, où se trouvent la plupart des emplois formels. Pourtant, les personnes que je rencontre ici ont toujours du mal à trouver un travail approprié.

Une grande partie de la théorie que nous apprenons en classe traite de l'investissement dans le capital humain sous forme d'éducation, de formation, d'entrepreneuriat et de renforcement des compétences... Cependant, ce que l'on observe en Côte d'Ivoire, c'est une économie qui n'est pas encore suffisamment diversifiée pour absorber sa propre main-d'œuvre qualifiée. Le chômage, ainsi que le sous-emploi, continuent donc d'être un défi majeur à mesure que les jeunes générations atteignent l'âge de participer à l'économie locale. De plus, les données présentées par le PNUD lors du lancement du Rapport sur le développement humain 2025 en Côte d'Ivoire, auquel j'ai eu l'occasion d'assister, ont confirmé un paradoxe troublant : plus les jeunes sont éduqués, plus ils sont susceptibles d'être au chômage. En 2023, le taux de chômage des jeunes diplômés atteignait 12,4 %, contre seulement 1,3 % chez ceux qui n'avaient pas suivi d'études formelles.

Que se passe-t-il lorsque le marché du travail n'est pas prêt à accueillir les compétences et le talent de jeunes motivés qui attendent avec impatience des opportunités et des changements ? Potentiellement beaucoup de désillusion, de rébellion et de troubles. Pourtant, je suis surpris de constater qu'il y a beaucoup d'espoir et de résilience dans le tissu social ici, probablement grâce à la forte présence de différentes confessions religieuses.

Cependant, je pense que l'espoir et la foi, même s'ils peuvent aider à traverser des situations politiques et économiques défavorables, ne peuvent se substituer à des changements concrets. Les gens méritent de voir leur situation s'améliorer, ils méritent plus que l'espoir d'un avenir meilleur.

Ce stage m'a amené à réfléchir aux obstacles structurels qui empêchent la participation économique de la majeure partie de la population. Je suis convaincu que, même si des programmes et des partenariats au niveau local sont nécessaires pour mettre en évidence les besoins de la population, il faut de meilleures politiques pour créer un environnement propice au changement structurel, en particulier dans le domaine de la technologie et de l'intelligence artificielle, qui sont au cœur de nombreux programmes et projets du PNUD. Les jeunes férus de technologie ont un immense potentiel pour contribuer au développement de leur beau pays, riche en ressources naturelles et en produits agricoles. Mais comment le pays peut-il entrer dans les chaînes de valeur mondiales, se moderniser et tirer parti de la main-d'œuvre qualifiée qui existe mais qui n'est pas absorbée par le marché actuel ? Comment peut-il diversifier son économie basée sur les exportations agricoles avec des produits de consommation finis au lieu d'importer ces derniers d'autres pays ? Au cours des prochains mois, je vais travailler sur un projet qui vise à promouvoir l'autonomisation économique des jeunes en Côte d'Ivoire en renforçant leur potentiel entrepreneurial et en leur donnant les compétences nécessaires pour participer à l'économie locale et mondiale.