Une détentrice de record Guinness de l’Université d’Ottawa dresse la liste des maladies les plus mortelles de l’histoire

Par Université d'Ottawa

Cabinet de la vice-rectrice à la recherche et à l'innovation, CVRRI

An allegory of malaria (after Maurice Sand)
An allegory of malaria (selon Maurice Sand). Image : Wellcome Collection. CC BY 4.0
Oui, vous avez bien lu. Stacey Smith?, professeure à l’Université d’Ottawa, a établi un record Guinness en corédigeant le premier modèle mathématique évalué par les pairs sur la manière de survivre à une attaque de zombies, intitulé Mathematical Modelling of Zombies. Voilà pour son record Guinness. Parlons maintenant de son plus récent projet.

Un nouveau livre de la professeure Stacey Smith? pourrait lui aussi établir un genre de record Guinness. Intitulé The Top Ten Diseases of All Time, il est rédigé en réaction au manque étonnamment persistant de données et de ressources en ligne.

« Je cherchais depuis un certain temps des listes à ce sujet. Je pensais que Buzzfeed ou autre aurait possiblement déjà dressé ce genre de liste, explique Stacey Smith?. Quand j’ai vu que ce n’était pas le cas, j’ai rapidement fait de ma quête de réponses une affaire personnelle. »

Publié par les Presses de l’Université d’Ottawa dans le cadre de la Collection 101, The Top Ten Diseases of All Time décrit les éclosions les plus fatales de l’histoire et inclut des données scientifiques, des récits et des leçons à retenir.  

Mêlant les mathématiques, le récit et un humour acéré, le livre raconte autant les épidémies d’hier que les pandémies d’aujourd’hui, et révèle pourquoi les leçons importantes tombent toujours dans l’oubli.

Regardez notre entrevue avec la professeure Smith? ci-dessous (en anglais avec sous-titres français).

« Mieux vaut ne pas se retrouver dans une pandémie intéressante. »

Sans entrevoir l’avenir d’un œil apocalyptique, la professeure Smith? ne cherche pas non plus à l’édulcorer. « La pandémie de COVID-19 était en fait ennuyeuse à bien des égards, affirme-t-elle. Mieux vaut ne pas se retrouver dans une pandémie intéressante. C’est une situation qui est loin d’être agréable. »

Elle souligne la rapidité exceptionnelle avec laquelle un vaccin contre la COVID-19 a vu le jour, alors que pour le VIH, pandémie considérée comme très intéressante, il n’en existe toujours pas.

Depuis la COVID-19, on l’a déjà échappé belle avec la variole du singe.

« C’est une pandémie avortée, du moins en Occident. Un vaccin pour la variole existait déjà. Les communautés queers, qui ont vécu la pandémie de sida, ont pris la situation au sérieux. Elles n’ont pas perdu de temps et ça a porté ses fruits. »

Des hybrides vache-humain et la guerre contemporaine contre la science

La professeure Smith? plonge dans la longue histoire de la désinformation médicale, un phénomène qui a vu le jour avant l’arrivée d’Internet.

« Lorsqu’on a créé le vaccin contre la variole, dans les années 1800, des caricatures politiques montraient des gens se transformant en créatures mi-vaches, mi-humaines. Les gens étaient vraiment inquiets. »

Dans deux cents ans, certains mythes contemporains – comme le lien inexistant entre les vaccins et l’autisme – pourraient sembler tout aussi absurdes. Mais ils apportent tout de même leur lot de conséquences.

« Les vaccins nous ont permis de doubler notre espérance de vie en un siècle seulement, explique Stacey Smith?. Les vaccins à ARNm sont incroyablement prometteurs et pourraient nous sauver la vie – à nous, à nos enfants et à nos petits-enfants. Je me désole de voir le nombre de fois où le progrès se heurte à des obstacles, que ce soit des coupes budgétaires ou la méfiance du public. »

La professeure estime que les scientifiques n’ont pas à porter tout le fardeau de la déconstruction de tels mythes. « Il est vrai que la communauté scientifique pourrait mieux communiquer. Elle a besoin de formation sur les médias. Cela dit, le public a aussi besoin de meilleures connaissances scientifiques. C’est une responsabilité partagée. »

La littératie scientifique est au cœur de la Collection 101, une série d’ouvrages concis et accessibles, rédigés par des spécialistes à l’intention du grand public. La professeure Smith? en assure la direction éditoriale pour l’édition anglaise, veillant à transformer des sujets complexes en lectures captivantes et faciles à comprendre.

Mathématiques, modèles et prochaine pandémie

The Top Ten Diseases of All Time porte un message discret, mais urgent : il faut mieux anticiper la prochaine crise avant qu’elle ne frappe. Pour ce faire, il faut concevoir de meilleurs modèles et rendre les connaissances accessibles – pas seulement dans les revues scientifiques, mais aussi en classe, dans les énoncés de politiques et dans le débat public.

La professeure Smith? soutient que la modélisation mathématique ne devrait pas se limiter à la prédiction du taux de mortalité ou de reproduction (R₀, prononcé « R zéro ») d’un virus. Cet outil puissant permet de mettre à l’essai des scénarios, de repérer les vulnérabilités et d’intervenir intelligemment avant qu’une maladie ne frappe.

« Pour mieux gérer les crises de demain, on a autant besoin de connaissances sur le comportement humain et les failles du système que de vaccins et de respirateurs. »

La force des mathématiques… et de la compassion

De jour, la professeure Smith? enseigne le calcul, mais de soir, elle modélise les pandémies. Pour elle, la puissance des mathématiques réside dans leur capacité à nous faire comprendre et anticiper les systèmes complexes, mais elle insiste pour dire qu’il ne faut pas perdre l’aspect humain de vue.

« Contrairement à ce que certains pensent, la force de notre société réside dans le fait qu’on ne laisse pas mourir les plus faibles. Cet instinct de soigner les autres et de protéger les plus vulnérables, c’est une force. Mais ça ne s’arrête pas là. En combinant différentes perspectives, expériences vécues et manières de penser, la société ne gagne pas qu’en équité. Elle devient plus intelligente et résiliente. C’est là le vrai pouvoir de l’interdépendance. »

Le style de la professeure Smith? est d’une accessibilité désarmante. Dans Mathematical Modelling of Zombies, elle utilise des éclosions fictives pour enseigner la modélisation d’épidémies réelles. Et dans Braaaiiinnnsss!, elle et son équipe de corédaction se servent des zombies pour se moquer de tout : des systèmes juridiques aux craintes sociétales. 

The Top Ten Diseases of All Time est rédigé dans le même esprit et allie rigueur, accessibilité et humour noir.

L’ouvrage est accessible en version papier ou numérique aux Presses de l’Université d’Ottawa. Obtenez votre copie ici!

Et oui, c’est Smith? avec un point d’interrogation. 

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