Études supérieures : Séminaires de l'automne 2023

Faculté des arts
Département de français
Séminaire
Livres et littérature
tabaret à l'automne
Le Département de français a le plaisir d'offrir quatre séminaires cet automne aux cycles supérieurs.

FRA 5560 : Analyse du discours

PROFESSEURE : Claudia Bouliane

2023 en revue. Analyse du discours littéraire québécois contemporain

OBJECTIFS ET CONTENU DU SÉMINAIRE

« Le réel, c'est ce qui nous résiste et nargue nos plans sur la comète. » (Régis Debray, Éloge des frontières, 2010)

Le réel résiste, le nôtre peut-être davantage encore en raison de notre impression d’accès immédiat aux phénomènes qui nous entourent. Or la compréhension humaine, du moins celle du fait social, passe par le langage et, surtout, par son actualisation en discours, renouvelée à chaque prise de parole écrite ou orale : autant de médiations, lesquelles forment l’objet d’investigation principal des chercheur.se.s qui réfléchissent aux manières dont on donne sens au réel, à défaut du réel lui-même. Dans le cadre de ce séminaire, il s’agira d’appréhender la réalité de l’année en cours qu’elle est mise en texte par des écrivain.e.s francophones du Québec. Cette analyse du discours littéraire québécois de l’extrême contemporain à partir d’une perspective synchronique se fera suivant l’angle d’approche préconisé par Dominique Maingueneau (2004).

Formant pour la période du trimestre une équipe de recherche, les étudiant.e.s se pencheront dans un premier temps sur les derniers numéros de revues culturelles et littéraires qui réunissent une multitude de visions du monde et de voix tentant toutes de rendre compte d’une réalité qui toujours nous échappe. Il.elle.s travailleront à mettre au jour des enjeux sociaux et des procédés textuels les exprimant afin « d’évaluer et de mettre en valeurleur historicité, leur portée critique et leur capacité d’invention à l’égard du monde social » (Popovic, 2011). Notre enquête s’organisera autour de cinq concepts cardinaux : 1) l’idéologie, telle qu’on l’étudie en littérature (Hamon, Kristeva) ; 2) l’intertextualité (Bakhtine, Todorov) ; 3) le discours social (Angenot, Robin) ; 4) le stéréotype (Amossy, Dufays) et 5) l’ironie (Denis, Schoentjes). Dans un deuxième temps, chaque étudiant.e choisira un roman publié en 2023 qui sera examiné à la lumière d’une problématique originale et en dialogue avec les discours (littéraire et social) qui circulent sur ce sujet.

Au terme de ce séminaire, l’étudiant.e sera en mesure d’analyser des œuvres littéraires diverses suivant l’approche de l’analyse du discours social, de présenter une lecture de texte sous forme de communication et de transposer cette présentation en article scientifique.

La présence à l’ensemble des séances du séminaire est obligatoire.

CORPUS À L'ÉTUDE

Articles scientifiques 

Déposés sur Brightspace : en général deux par semaine, dont un seul sera obligatoire. Tous pourront faire l’objet d’une fiche de lecture théorique (voir le modèle sur Brightspace), dont seulement deux seront évaluées (10% de la note finale).

Revues 

À emprunter au moyen de l’abonnement institutionnel à la plateforme Érudit.org (via la bibliothèque universitaire) ; certains textes seront disponibles pour annotation collective sur Perusall.

Roman 

Au choix, pour les deux évaluations finales (exposé oral et travail écrit) : à emprunter à la bibliothèque (les institutions municipales ont souvent de bons catalogues d’ouvrages numériques) ou à acheter (idéalement dans une librairie indépendante, sur le site des Libraires).

Ouvrages de référence (sélection partielle)

  • ANGENOT, Marc. 1889 : Un état du discours social, Longueuil, Édition du préambule, 1989.
  • BAKHTINE, Mikhaïl (V. N. Voloshinov). Le marxisme et la philosophie du langage, Paris, Éditions de Minuit, 1977 [1929].
  • CHARAUDEAU, Patrick et Dominique MAINGUENEAU (dir.). Dictionnaire d’analyse du discours, Paris, Seuil, 2002.
  • DUCROT, Oswald. Le dire et le dit, Paris, Minuit, 1984.
  • HAMON, Philippe. Texte et idéologie, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 1997.
  • KRISTEVA, Julia. Semeiotike. Recherches pour une sémanalyse, Paris, Seuil, coll. « Points »,1969.
  • MAINGUENEAU, Dominique. Le discours littéraire, Paratopie et scène d’énonciation, Paris, Armand Colin, 2004.
  • POPOVIC, Pierre. « La sociocritique. Définition, histoire, concepts, voies d’avenir », Pratiques, vol. 151/152, (décembre 2011), p. 7-38.
  • MITTERAND, Henri. Le discours du roman, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Écriture », 1986.
  • TODOROV, Tzvetan. Mikhaïl Bakhtine, le principe dialogique, suivi des Écrits du Cercle de Bakhtine, Paris, Seuil, 1981.

Socius (lexique théorique et ressources diverses)

Les textes théoriques (articles, chapitres de livre) qui seront discutés en classe et qui feront l’objet de fiches de lecture (modèle fourni) seront versés sur Brightspace.

Des textes théoriques complémentaires dont la lecture ne sera pas obligatoire seront aussi ajoutés sur Brightspace.

ÉVALUATIONS

Un exposé et un travail de session

FRA 7765 : Genres brefs

PROFESSEUR : Nelson Charest

Bref : Paramètres de la finitude

OBJECTIFS ET CONTENU DU SÉMINAIRE

La question de la brièveté de la vie a de tout temps préoccupé l’humain, de Sénèque aux débats actuels sur l’aide médicale à mourir ou, bien sûr, aux inquiétudes planétaires sources d’écoanxiété. Comment vivre quand on envisage la fin ? On peut aussi se demander, et tout à l’inverse : « envisager la fin », n’est-ce pas cela, précisément, ce que nous appelons « vivre » ?

À cette question, la langue, le discours, la parole, tout particulièrement poétique, tente d’apporter un viatique, un remède. C’est une des raisons pour lesquelles la poésie n’apparait pas seulement comme une modalité du langage mais, précisément, comme un art de vivre. Une « manière d’être » comme le dit Marielle Macé, une « espérance » comme le dit Bonnefoy, qui produit plus qu’un simple « enchantement » de la vie mais une véritable éthique post-divine et strictement humaine.

Ce séminaire se présentera comme un retour rétrospectif sur une réflexion menée ces dernières années. En ce sens, il pourra guider tout particulièrement les candidats en création amenés à élaborer ce genre de critique a posteriori. Nous tenterons de montrer que ce que la « poésie », l’écriture poétique et la vie poétique, représente dans son ensemble, et ce qu’elle tente d’inscrire dans ses éléments est ce que Jean-Luc Marion nomme le « surcroît » ; le surplus, la largesse, le don, l’excès et l’excédent, ce que la figure de l’hyperbate montre et symbolise.

Naïvement peut-être, on pourra croire que la poésie propose quelque chose comme un vœu pieux ou une chimère, que voici : quand tout semble épuisé, quand le temps est écoulé, il en reste encore, pour reprendre une formule chère à Derrida. Nous proposerons que c’est plutôt à une extrême exigence, à un haut défi que nous convie cette éthique : celle d’apprendre à façonner et à créer du surcroît. Car face à cette naïveté s’érige une certitude indubitable : notre monde actuel a bien besoin d’un peu plus de temps pour résoudre les problèmes auxquels il fait face…

CORPUS À L'ÉTUDE

Textes

Une œuvre d’un poète étranger, en traduction française, au choix parmi celles de : Anna Akhmatova, Fernando Pessoa, Tomas Tranströmer, Walt Whitman. Voici quelques exemples des éditions disponibles :

  • Anna Akhmatova, Requiem. Poème sans héros et autres poèmes, Paris, Gallimard, « Nrf Poésie »
  • Fernando Pessoa, Poèmes païens d’Alberto Caeiro et de Ricardo Reis, Paris, Seuil, « Points »
  • Tomas Tranströmer, Baltiques. Œuvres complètes 1954-2004, Paris, Gallimard, « Nrf Poésie »
  • Walt Whitman, Feuilles d’herbe, Grasset, « Les cahiers rouges »

Ouvrages de référence

  • Nelson Charest, Paramètre de la finitude. Brièveté et poésie, Montréal, Nota Bene, 2023.
  • Jacques Derrida, Donner le temps. La fausse monnaie, Paris, Galilée, « La philosophie en effet », 1991.
  • Gérard Dessons, La voix juste. Essai sur le bref, Paris, Manucius, « Le marteau sans maître », 2015.
  • Marielle Macé, Façons de lire, manières d’être, Paris, Gallimard, « Tel », [2011] 2022.
  • Judith Schlanger, Trop dire ou trop peu. La densité littéraire, Paris, Hermann, « Littérature », 2016

ÉVALUATIONS

Un débat, un exposé oral et un rapport de séminaire

FRA 5507 : Enjeux de la littérature

Les métamorphoses du roman historique et les enjeux de la modernité romanesque  

PROFESSEUR : Michel Fournier

OBJECTIFS ET CONTENU DU SÉMINAIRE

Le roman historique connaît, de nos jours, une très grande popularité. Ce genre, qui a donné lieu à de nombreux succès éditoriaux, a joué un rôle important dans l’histoire du roman. Il a participé, sous les modalités de la « nouvelle historique », à l’affirmation d’une première forme de modernité romanesque (XVIIe siècle). Il a connu de nouvelles métamorphoses au XIXe siècle, notamment à travers l’héritage de Walter Scott. Le roman historique a alors pris part au développement d’une production « populaire », sous la forme du roman d’aventures. En raison de son aptitude à transmettre un ensemble de savoirs, ce genre a fini par occuper une place privilégiée dans la littérature pour la jeunesse, où il est parfois fortement investi sur le plan idéologique. Le roman historique a été présent, dans la seconde moitié du XXe siècle, non seulement dans la production « populaire » ou « paralittéraire », mais aussi dans une tradition plus érudite, parfois à l’avant-garde de la production romanesque. 

Dans le cadre de ce séminaire, nous chercherons à mieux comprendre les enjeux qui marquent la poétique du roman historique en portant une attention particulière à la façon dont ce genre traverse la frontière entre la littérature et la production « paralittéraire ». Nous nous intéresserons, dans un premier temps, à l’émergence du roman historique et à son inscription dans les débats entourant la forme romanesque. Afin d’étudier le rapport au passé qui caractérise ce genre, nous mettrons en parallèle son développement et celui du discours historique. Nous nous intéresserons à la relation entre le roman historique et l’imaginaire social en cherchant à voir comment ce genre est non seulement un lieu d’expression privilégié de l’idéologie dominante, mais aussi un espace conflictuel où peuvent s’exprimer différentes représentations du passé.

CORPUS À L'ÉTUDE

Textes   

  • Saint-Réal, César Vichard de, Dom CarlosNouvelle historique [1672], Paris, Le Livre de Poche.
  • Mérimée, Prosper, Chronique du règne de Charles IX [1829] (ouvrage disponible dans diverses éditions numériques).   
  • Golon, Anne, Angélique, t.1, Marquise des anges [1956], Paris, L’Archipel, 2010. 
  • Pécherot, Patrick, Les Brouillards de la butte [2001], Paris, Gallimard, « Folio policier ».  
  • Salvayre, Lydie, Pas pleurer [2014], Paris, Seuil, « Points ».  
  • Josse, Gaëlle, L’Ombre de nos nuits [2016],Paris, J’ai lu.
  • Recueil numérique d’extraits et d’articles. 

Articles et ouvrages de référence :   

  • Bernard, Claudie, Le Passé recomposé. Le roman historique français du dix-neuvième siècleParis, Hachette, 1996. 
  • Bertrand, Marc, « Roman contemporain et histoire », The French Review, vol. 56, 1982, p. 77-86. 
  • Durand-Le Guern, Isabelle, Le Roman historique, Paris, A. Colin, 2008. 
  • « L’Histoire saisie par la fiction », numéro de la revue Le Débat (no165, 2011).  
  • Hutcheon, Linda, A Poetics of Postmodernism: History, Theory, FictionNew York, Routledge, 1988.  
  • Jablonka, Ivan, L’Histoire est une littérature contemporaine. Manifeste pour les sciences sociales, Seuil, 2014. 
  • Krulic, Brigitte, Fascination du roman historiqueIntrigues, héros et femmes fatales, Paris, Autrement, 2007.  
  • Ricœur, Paul, La Mémoire, l’histoire, l’oubli, Paris, Seuil, 2000.  
  • Rubino, Gianfranco et Dominique Viart (dir.), Le Roman français contemporain face à l’Histoire, Macerata, Quodlibet, 2014.  
  • Sarrot, Jean-Christophe et Laurent Broche, Le Roman policier historique. Histoire et polar : autour d’une rencontre, Paris, Nouveau Monde éditions, 2009. 

ÉVALUATIONS

Une présentation et un rapport de séminaire.  

FRA 5570 : Littérature comparée (en ligne)

Les Mythologies modernes. Configurations de l’imaginaire social, du xixe siècle à aujourd’hui

PROFESSEUR : Maxime Prévost

OBJECTIFS ET CONTENU DU SÉMINAIRE

« Les mythes modernes sont encore moins compris que les mythes anciens, quoique nous soyons dévorés par les mythes », écrivait Honoré de Balzac. Les xixe et xxe siècles sont parvenus à donner jour à plusieurs mythes modernes, distincts de ceux des mythologies classiques, répondant sans doute à de nouveaux besoins et à de nouveaux questionnements. Certes, les mythes antiques ont continué d’exercer leur présence dans la littérature; certes les mythes de Prométhée et d’Orphée ont « irradié » les œuvres de Shelley et de Nerval, comme plus tard celui Sisyphe celle de Camus.

Cependant, de nouveaux mythes les ont côtoyés, leur ont succédé, les ont à vrai dire supplantés dans la conscience collective. Le mythe « révèle », écrit Pierre Brunel; il constitue « l’objectivation de l’expérience sociale de l’humanité », selon Ernst Cassirer : le but de ce séminaire sera donc de réfléchir à ce que révèlent et objectivent un certain nombre de mythes nés au cours des deux derniers siècles dans la littérature française (Carmen, Le Tour du monde en quatre-vingts jours, le Fantôme de l’Opéra, la « Planète des singes ») et britannique (Dracula), en les analysant non seulement dans l’œuvre où ils apparaissent, mais aussi dans leurs différents vecteurs mémoriels.

Alors même que la critique littéraire n’a jamais véritablement pris acte de la mort de l’auteur déclarée naguère avec fracas, les personnages mythiques qui peuplent notre imaginaire constituent un terrain d’enquête fascinant et nouveau, qui exige une perspective transculturelle et comparatiste, entre socio et mythocritique, plus vaste que l’étude d’un ou de plusieurs auteurs. L’emprise de tels personnages sur l’imaginaire collectif soulève plusieurs questions tant sur leur contexte d’origine que sur les conditions de leur longévité virtuelle. En quoi des personnages comme Quasimodo, Carmen, Phileas Fogg constituent-ils des réponses à des attentes latentes mais historiquement déterminées? Les raisons de leur survie sont-elles les mêmes que celles de leur succès d’origine?

Note: Il sera possible de lire Dracula en traduction française. L’exposé et le travail de session porteront sur un sujet choisi par l’étudiant, approuvé par le professeur.

CORPUS À L'ÉTUDE

Textes

  • 1831 : Victor Hugo, Notre-Dame de Paris, «Folio classique»
  • 1845 : Prosper Mérimée, Carmen, «Le Livre de poche»
  • 1873 : Jules Verne, Le Tour du monde en quatre-vingts jours, «Le Livre de poche»
  • 1897 : Bram Stoker, Dracula, «The Modern Library Classics»
  • 1910 : Gaston Leroux, Le Fantôme de l’Opéra, «Le Livre de poche»
  • 1963 : Pierre Boulle, La Planète des Singes, «Pocket»

Ouvrages de référence

  • Pierre Brunel (dir.), Dictionnaire des mythes littéraires et Dictionnaire des mythes d’aujourd’hui, Monaco, Éditions du Rocher, 1988 et 1999.
  • Ernst Cassirer, La Philosophie des formes symboliques. 2 : La Pensée mythique, trad. de Jean Lacoste, Paris, Éditions de Minuit, 1972.
  • Cornelius Castoriadis, L’Institution imaginaire de la société, Paris, Éditions du Seuil, «Points essais», 1975.
  • Maxime Prévost, Alexandre Dumas mythographe et mythologue. L’Aventure extérieure, Paris, Honoré Champion, «Romantisme et modernité», 2018.
  • Simone Vierne, Rite, roman, initiation, Presses universitaires de Grenoble, 2000.

ÉVALUATIONS

Un exposé et un travail de session