La situation pourrait toutefois changer grâce à une initiative de recherche novatrice pilotée par le professeur Michael Geist.
Le professeur Geist a obtenu une subvention Savoir du Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) pour un projet de quatre ans intitulé « Absent Voices: Bridging the Canadian Digital Policy Divide ». Alors que les gouvernements promulguent des lois ambitieuses sur la diffusion en ligne, l’intelligence artificielle, la protection de la vie privée et les marchés numériques, on fait souvent peu de cas des voix critiques qui s’élèvent, notamment celles des créatrices et créateurs numériques, des médias indépendants et des organismes de défense de l’intérêt public. Ce nouveau projet vise à déterminer les raisons de l’absence persistante de ces voix et à ouvrir une avenue plus inclusive et plus transparente pour l’élaboration de politiques numériques au Canada.
Cette recherche intervient à un moment crucial. Ces dernières années, le Canada a adopté ou proposé plusieurs politiques numériques très médiatisées, dont la Loi sur la diffusion continue en ligne (projet de loi C-11) et la Loi sur les nouvelles en ligne (projet de loi C-18), qui ont entraîné des discussions importantes et suscité une mobilisation politique. Les grandes parties prenantes du secteur dominent depuis longtemps le débat, mais un nouveau groupe plus diversifié, qui rassemble des créatrices et créateurs, des petits médias et des défenseuses et défenseurs de l’intérêt public, exige aujourd’hui d’avoir sa place à la table. Le projet du professeur Geist défend l’idée que l’exclusion des voix non traditionnelles, loin d’être une anomalie, est symptomatique d’un fossé systémique plus profond en matière de politiques numériques.
Michael Geist procédera en parallèle à une analyse rigoureuse des lois et des politiques et à un examen attentif de l’évolution des politiques numériques canadiennes au fil du temps. Il se penchera sur les fondements théoriques du droit et les approches de la participation citoyenne et de la collaboration inclusive privilégiées par le gouvernement. Il s’intéressera également aux structures de participation mises en place ailleurs dans le monde, notamment aux États-Unis, dans l’Union européenne et dans des pays de l’Asie-Pacifique, l’objectif étant de recenser des modèles susceptibles d’inspirer des processus plus inclusifs au Canada. Une attention particulière sera accordée à des domaines clés comme la modération de contenu, la protection de la vie privée, l’intelligence artificielle, la responsabilité des plateformes, l’application du droit d’auteur, le commerce numérique, le soutien aux productions cinématographiques et télévisuelles et la protection des médias locaux.
Le projet s’articulera notamment autour d’une recherche de terrain portée par la collectivité. L’équipe du professeur Geist travaillera étroitement avec des collaboratrices et collaborateurs appartenant à des communautés de création numérique et de médias indépendants, dont des organisations comme Village Media, Narcity, Digital First Canada et Skyship Entertainment. Ces partenaires l’aideront à organiser des ateliers sur le terrain et des groupes de discussion qui permettront aux voix sous-représentées dans le paysage numérique canadien de se faire entendre et contribueront ainsi à mettre en évidence les obstacles qui les empêchent de participer efficacement à l’élaboration des politiques.
Ce projet s’appuie sur plus de 20 années de recherches du professeur Geist sur les politiques numériques au Canada. De ses premiers travaux sur la gouvernance d’Internet et la compétence en la matière à ses recherches récentes sur le droit d’auteur, la neutralité d’Internet et les préjudices en ligne, Michael Geist a régulièrement mis en évidence l’incidence de la réglementation numérique sur les personnes et les communautés. Il occupe la Chaire de recherche du Canada en droit de l’Internet et du commerce électronique depuis 2003 (deux mandats comme titulaire de chaire de niveau 2, suivis de deux mandats comme titulaire de chaire de niveau 1). Avec le projet Absent Voices, il continue d’imprimer sa marque en jetant un regard critique sur l’écart qui se creuse entre les décisions concernant les politiques et les personnes qu’elles touchent le plus.
La Section de common law félicite le professeur Geist et lui souhaite beaucoup de succès dans ce projet fort opportun!