Les stagiaires Julia Kafato et Courtney Wong avec le directeur de la CIPPIC Matt Malone à la Cour fédérale
Les stagiaires Julia Kafato et Courtney Wong avec le directeur de la CIPPIC Matt Malone à la Cour fédérale
Lorsque le professeur de droit Michael Geist a lancé la Clinique d’intérêt public et de politique d’Internet du Canada Samuelson-Glushko (CIPPIC) il y a plus de vingt ans, il savait que le droit numérique et de l’Internet méritait une attention particulière. Toutefois, il ne se doutait pas de l’importance que la clinique prendrait au fil des ans.

« Quand on lance un tel projet, on ne sait jamais si cela va marcher », explique le professeur Geist, qui s’est joint à la Faculté de droit en 1998 et qui est actuellement titulaire de la Chaire de recherche du Canada en droit de l’Internet et du commerce électronique. « La CIPPIC est devenue plus importante et pertinente que je ne l’aurais jamais imaginé. »

La CIPPIC est la première et la seule clinique d’intérêt public en droit des technologies au Canada. Elle informe la population canadienne sur divers sujets, comme les lois liées à l’Internet, la propriété intellectuelle, les gouvernements ouverts et les télécommunications. La clinique intervient également au nom du public lorsque des questions de droit des technologies sont portées devant les tribunaux ou les assemblées législatives.

Matt Malone, directeur de la CIPPIC, explique que la clinique donne une voix aux personnes les plus vulnérables de la société, ce qui est de plus en plus important dans l’économie numérique actuelle.

« Bon nombre des plus grandes entreprises du monde sont des sociétés technologiques dont la valeur boursière dépasse le PIB de pays comme le Canada. Ces entreprises ont un pouvoir énorme sur nous, déclare M. Malone. Je crois qu’il est absolument essentiel que des acteurs de la société civile, comme la CIPPIC, fassent pression pour que les lois et les politiques servent l’intérêt public. »

La CIPPIC voit le jour en 2003, grâce à des fonds obtenus à la suite d’une action collective impliquant Amazon.com. L’octroi de ces fonds par le tribunal, ainsi qu’une subvention de contrepartie du gouvernement de l’Ontario, permet à l’Université d’Ottawa de démarrer une clinique pour servir l’intérêt public en matière de droit des technologies.

Ce n’est toutefois que 15 ans plus tard que la CIPPIC reçoit le financement qui lui permet de consolider son rôle en tant que figure de premier plan en matière de politiques et de droit des technologies, au Canada et à l’international.

En 2018, la clinique de droit reçoit un don d’un million de dollars du couple formé de Pam Samuelson et de Robert Glushko, qui enseignent tous les deux à l’Université de Californie à Berkeley. La clinique de droit des technologies de l’Université d’Ottawa est l’un des cinq établissements du genre en Amérique du Nord à avoir bénéficié du soutien financier du duo. 

« Leur don nous a donné les moyens de poursuivre nos travaux à long terme et de défendre l’intérêt public, affirme Matt Malone. De telles contributions nous permettent de réaliser des objectifs que nous n’aurions pu atteindre autrement. »

Par exemple, dans une affaire toujours en cours, la CIPPIC a saisi la Cour fédérale d’un dossier visant à empêcher les programmes d’intelligence artificielle d’avoir le titre d’« auteur » en vertu de la législation canadienne sur le droit d’auteur.

« Il s’agit d’un dossier extrêmement important au Canada, et il n’aurait pu être mis de l’avant sans notre travail et ces ressources », poursuit M. Malone.

Le don du couple Samuelson-Glushko a également permis à la CIPPIC de continuer à former la relève en droit des technologies, y compris la fille de Michael Geist, qui a obtenu son diplôme en 2024. Elle faisait partie des 20 à 30 membres de la communauté étudiante qui travaillent à la clinique chaque année comme bénévoles, assistantes et assistants de recherche et stagiaires d’été.

Kaitlyn Margison est l’une des centaines d’étudiantes et d’étudiants en droit qui ont tiré parti de leur passage à la clinique au fil des ans. Elle y a effectué deux stages en 2022 et en 2023, et y a travaillé comme associée de recherche. Forte de cette expérience, elle a obtenu un stage chez Osler, un grand cabinet canadien de droit des affaires, et travaille actuellement comme auxiliaire juridique à la Cour fédérale.

Elle affirme que son expérience à la CIPPIC lui a donné des outils qu’elle n’aurait pas pu acquérir dans ses cours.

« On apprend beaucoup en étudiant le droit, mais on ne sait pas vraiment à quoi s’attendre dans la pratique, dit-elle. À la CIPPIC, on ne fait pas que rédiger des dissertations. On contribue à des dossiers qui seront présentés à la Cour, qui mèneront à des décisions sur des sujets importants. »

Même si le généreux don du couple Samuelson-Glushko sera épuisé cette année, Kaitlyn Margison espère que la CIPPIC demeurera un endroit où la communauté étudiante de droit de l’Université d’Ottawa pourra continuer d’acquérir de l’expérience pratique en lien avec les enjeux de technologie qui touchent la population canadienne.

Michael Geist partage cet espoir.

« Je continue de croire qu’on peut aller jusqu’au bout du rêve. Si l’on construit quelque chose, les gens viendront – il en va de même pour le type de soutien qui pourrait s’avérer nécessaire à l’avenir, affirme-t-il. J’espère que la clinique deviendra un élément permanent du paysage des politiques en matière de numérique au Canada. »

Cet article fait partie d'une série de reportages sur les retombées de la campagne historique de 541 M$ de l'Université d'Ottawa, RePENSER. Chaque histoire représente l'engagement de notre communauté envers l'innovation et l'excellence.