Cycles solaires et climat canadien : ce qu’il faut savoir
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Ciels Changeants, Liens Solaires

La période d’activité maximale du cycle solaire de 2025 – son point culminant – devrait se caractériser par une augmentation du nombre de taches solaires, d’éruptions solaires et d’éjections de masse coronale. Ce sommet est attendu dans la deuxième moitié de 2025, au même moment que l’inversion des pôles magnétiques du Soleil. Une telle activité solaire pourrait avoir une incidence sur les régimes climatiques canadiens en influençant les systèmes météorologiques.

Nous avons interrogé à ce sujet Hossein Bonakdari, professeur agrégé en génie civil à la Faculté de génie.

Qu’est-ce que le cycle solaire?

Hossein BonakdariLe cycle solaire est une période de 11 ans durant laquelle l’activité du Soleil varie, un peu comme le battement d’un cœur. Parfois, le Soleil est calme, avec peu de ces taches sombres que l’on appelle « taches solaires »; à d’autres moments, il est très actif et en compte beaucoup. Ce cycle est dû à l’inversion du champ magnétique de l’astre, qui intervertit ses pôles Nord et Sud tous les 11 ans. Quand le Soleil est à son plus actif, environ au milieu du cycle, on observe plus de taches solaires et de libération d’énergie, notamment sous la forme d’éruptions solaires, d’énormes explosions à la surface du Soleil. Nous sommes actuellement dans le cycle solaire 25, qui a commencé en décembre 2019 et atteindra son maximum au milieu de l’année 2025.

Pourquoi le maximum d’activité solaire est-il important?

Hossein BonakdariDurant la période d’activité solaire maximale, les éruptions solaires et les éjections de masse coronale peuvent endommager les composantes électroniques des satellites ou augmenter le freinage atmosphérique, ce qui peut déstabiliser leur orbite. Les satellites, essentiels à la communication, à la navigation et aux prévisions météorologiques, sont vulnérables aux tempêtes solaires. Nous en avons eu un exemple mémorable en février 2022, lorsque 38 des 49 satellites Starlink de SpaceX ont été détruits en rentrant dans l’atmosphère en raison d’une tempête géomagnétique. Les tempêtes solaires peuvent produire des courants géomagnétiques dans les réseaux électriques terrestres qui alimentent les maisons et les entreprises. Ces courants peuvent surcharger les transformateurs et causer des pannes. La panne de mars 1989 au Québec (Canada) en est un exemple historique : une tempête solaire avait alors privé six millions de personnes d’électricité pendant neuf heures. De plus, les tempêtes solaires ionisent la haute atmosphère terrestre, ce qui peut perturber les signaux radio et la précision GPS. En décembre 2005, des rayons X solaires ont interrompu pendant 10 minutes les signaux des satellites vers le sol et les signaux GPS, démontrant ainsi que même les pannes courtes peuvent avoir un effet sur certaines opérations critiques. 

L’activité solaire peut-elle avoir une incidence sur le climat terrestre?

Hossein BonakdariLe Soleil étant la principale source d’énergie du système climatique de la Terre, son activité peut avoir un effet sur les conditions atmosphériques et océaniques. L’activité solaire – dont les taches et les explosions – peut avoir une incidence sur le climat terrestre, mais cet effet est plutôt minime et la période d’activité maximale de 2025 n’influencera probablement pas les températures estivales de manière significative. Les derniers étés, notamment ceux de 2023 et de 2024, ont enregistré des chaleurs records et des températures mondiales plus élevées que jamais. On prévoit un climat semblable pour l’été 2025, avec des températures élevées et des phénomènes climatiques extrêmes comme des vagues de chaleur, de fortes pluies ou des sécheresses, mais ces événements sont principalement attribués aux changements climatiques d’origine humaine plutôt qu’à l’activité solaire. Les chaleurs intenses et les extrêmes climatiques potentiels de l’été 2025 sont plus étroitement liés aux émissions de dioxyde de carbone et de méthane, qui piègent la chaleur dans l’atmosphère, qu’au sommet d’activité actuel du Soleil.

Le soleil de cet été sera-t-il plus dangereux pour la santé en raison d’un rayonnement UV plus fort?

Hossein BonakdariLe rayonnement UV augmente pendant la période d’activité solaire maximale, mais ce changement est négligeable. Les études montrent que l’écart de rayonnement UV à la surface de la Terre est d’au plus 1 à 2% entre les périodes d’activité minimale et maximale, selon des données satellites collectées sur plusieurs cycles solaires (NASA Science – Solar Variability and Terrestrial Climate). Cette hausse est due à l’augmentation de l’éclairement énergétique solaire total (TSI), qui comprend les rayons UV, mais la variation totale du TSI est inférieure à 0,1% sur le cycle de 11 ans (Skeptical Science – Solar Activity & Earth’s Climate). Pour l’été 2025, il s’agit donc d’une très petite hausse de l’exposition aux rayons UV, insuffisante pour accroître à elle seule les risques pour la santé.

Hossein Bonakdari, professeur agrégé en génie civil à la Faculté de génie.
Environnement

« L’Arctique canadien se réchauffe à un rythme presque quatre fois plus rapide que le reste de la planète »

Hossein Bonakdari

— Professeur agrégé en génie civil à la Faculté de génie

Le réseau électrique canadien est-il prêt pour la prochaine tempête solaire?

Hossein BonakdariLe système électrique canadien, qui s’étend à travers les forêts, les villes et les régions éloignées, fait face à une menace cachée provenant de l’espace : les tempêtes solaires. Ces puissantes explosions solaires, les éjections de masse coronale (EMC), peuvent envoyer d’énormes vagues d’énergie vers la Terre. En frappant notre planète, ces dernières peuvent créer des tempêtes géomagnétiques qui induisent de forts courants électriques dans le sol. Ces courants, appelés courants induits géomagnétiquement (CIG), peuvent surcharger les lignes électriques et endommager les transformateurs, parfois en l’espace de quelques minutes. Le Canada est particulièrement à risque, car il est situé sous la région de l’atmosphère qui reçoit ces tempêtes avec le plus de force. Les fournisseurs d’électricité ont fait des progrès, notamment en installant des capteurs et des systèmes de ralentissement des CIG durant les tempêtes, mais il reste toujours des failles. Plusieurs transformateurs utilisés aujourd’hui sont vieux de plusieurs décennies et ne sont pas conçus pour résister à ce type de phénomène solaire.

L’activité solaire pourrait-elle fausser les données climatiques dans l’Arctique canadien?

Hossein BonakdariL’Arctique canadien se réchauffe à un rythme presque quatre fois plus rapide que le reste de la planète. C’est donc la région la plus fragile sur Terre et celle qui change le plus rapidement, et certains se demandent si l’activité solaire pourrait faire partie des causes. Il est vrai que l’activité du Soleil peut légèrement modifier la quantité d’énergie qui atteint la Terre et que cela a parfois un effet sur la haute atmosphère, mais lorsqu’il s’agit du réchauffement à long terme dans l’Arctique, la cause principale reste l’activité humaine, particulièrement l’utilisation des combustibles fossiles qui relâche du dioxyde de carbone (CO₂) et d’autres gaz à effet de serre. C’est pourquoi il est important de distinguer les effets à court terme du Soleil du réchauffement beaucoup plus important et constant causé par les humains. Il est plus urgent que jamais de réduire nos émissions de CO₂.