Le programme de mentorat de la Faculté de médecine vise à renforcer l’autonomie des apprenants noirs

Faculté de médecine
Étudiants

Par David McFadden

Research Writer, Faculty of Medicine

Saada Hussen
À l’approche du Mois de l’histoire des Noirs, nous nous intéressons de plus près à un programme en plein essor qui forme la prochaine génération de leaders dans le domaine médical.

Saada Hussen, aspirante médecin, s’est rendu compte qu’elle intériorisait un fardeau excessif en matière de représentation raciale lorsqu’elle a eu un accident de voiture en se rendant à l’Université d’Ottawa, il y a deux ans. Immédiatement après l’accident, l’étudiante en médecine de couleur noire s’est sentie inquiète à l’idée d’arriver en retard en classe, ce qui aurait eu pour effet, selon elle, de renforcer certains stéréotypes véhiculés sur les minorités, et notamment sur leur manque de ponctualité.

« Je me souviens que c’était la seule chose à laquelle je pensais, alors même que ma voiture était irrémédiablement endommagée », rapporte Saada Hussen. Originaire de Toronto, elle est la première membre de sa famille à faire des études en médecine, et est maintenant en troisième année à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa.

Si les études de médecine constituent un exercice d’équilibre difficile pour tous les apprenants en raison de la quantité de nouvelles expériences d’apprentissage, les étudiants noirs vivent souvent des pressions supplémentaires. Des études ont montré que les étudiants noirs éprouvent un sentiment accru d’isolement social. Plusieurs sentent qu’ils ont la responsabilité de représenter la communauté noire en raison de la sous-représentation persistante de celle-ci. Certains ont du mal à éprouver un sentiment d’appartenance.

Dr. Ewurabena Simpson

« Le programme de mentorat de l’AENM offre un espace sûr aux étudiants où ils peuvent être eux-mêmes et parler des défis qu’ils ne peuvent peut-être pas aborder ouvertement ailleurs. Je pense que le... »

Dr. Ewurabena Simpson

Grâce au soutien et au leadership du Bureau des affaires professorales, le groupe de mentorat de l’Association des étudiants noirs en médecine (AENM) a été mis sur pied, pour devenir le plus récent programme de mentorat de la Faculté de médecine. Bien qu’il n’en soit encore qu’à ses débuts, il est florissant et connaît une forte croissance grâce au soutien de plusieurs professeurs et mentors résidents de la Faculté de médecine.

Les apprenants noirs sont jumelés individuellement à des médecins mentors noirs de la Faculté de médecine et ses hôpitaux affiliés. Les objectifs du programme sont de sensibiliser les gens aux disparités en matière de santé dont sont victimes les Canadiens noirs et de favoriser une communauté d’inclusion qui encouragera la réussite scolaire et personnelle des étudiants noirs en médecine de l’Université d'Ottawa.  

Il est bien établi que le mentorat joue un rôle majeur dans l’avancement et la rétention des stagiaires et des étudiants. Et pour les apprenants des minorités raciales, il est crucial d’avoir des mentors qui partagent leur expérience, selon la Dre Ewurabena Simpson, professeure adjointe au Département de pédiatrie de l’Université d’Ottawa et doyenne adjointe du Bureau d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI).

« Le mentorat est un volet extrêmement important du développement de carrière en médecine, et lorsque vous et votre groupe n’êtes pas représentés parmi vos pairs et vos précepteurs, il peut être difficile de se voir comme un futur médecin accompli », soutient la Dre Simpson, également hématologue et oncologue pédiatrique au CHEO.

« Le programme de mentorat de l’AENM offre un espace sûr aux étudiants où ils peuvent être eux-mêmes et parler des défis qu’ils ne peuvent peut-être pas aborder ouvertement ailleurs. Je pense que le groupe de mentorat de l’AENM aide nos étudiants en médecine à se sentir soutenus et autonomes. »

Les étudiants participants sont tout à fait d’accord, louant le pouvoir du réseautage partagé et de la création d’un cercle de personnes qui les soutiennent, tant sur le plan professionnel que personnel. Le mentorat les aiderait dans l’avancement de leur carrière médicale et pour relever différents défis.

Patricia Burhunduli, étudiante au programme de M.D./Ph.D. à la Faculté de médecine, décrit son expérience de mentorat comme une « bouffée d’air frais ». Elle a été jumelée avec le Dr Kwadwo Kyeremanteng, médecin aux soins intensifs et aux soins palliatifs à l’Hôpital d’Ottawa et à l’Hôpital Montfort.

« Honnêtement, je ne serais pas ici si je n’avais pas eu de mentorat. Le fait de faire partie d’une communauté noire vous aide à vous sentir moins seul, très compris et très entendu », dit Patricia Burhunduli. « Cela a été un ajout vraiment puissant et important à mon parcours médical. »

Patricia Burhunduli et Saada Hussen, toutes deux ayant récemment dirigé l’AENM, sont déterminées à stimuler l’intérêt pour les carrières médicales de la communauté noire et à offrir eux-mêmes du mentorat. Sous la supervision de la Dre Simpson et en collaboration avec plusieurs collègues étudiants en médecine, ils ont mené une vérification du programme de lutte contre le racisme du programme de médecine de l’Université d’Ottawa afin d’améliorer la représentation des patients et des populations des minorités raciales dans le programme d’études médicales de premier cycle.

« Nous avons la chance de faire partie d’une cohorte où d’autres personnes sont également conscientes de ce problème », affirme Saada Hussen, qui est mentorée par le Dr Peter Munene, médecin en médecine interne générale à l’Hôpital d’Ottawa.

Patricia Burhunduli

Il y a beaucoup de possibilités d’amélioration en ce qui concerne la diversité et les obstacles systémiques qui empêchent une représentation équitable des groupes des minorités raciales en médecine. Par exemple, au Canada, où la « gentillesse » est souvent considérée comme un trait de l’identité nationale, on persiste à penser que le racisme n’est pas un problème. 

Pourtant, au Canada, les médecins noirs ont été constamment sous-représentés par rapport à leur proportion dans la population. Bien que les chiffres ne puissent pas donner un portait complet de la situation en matière d’équité et de diversité, ils aident à illustrer le problème. En Ontario, des recherches ont suggéré qu’un peu plus de 2 % des médecins sont noirs, alors que les chiffres du recensement canadien montrent que la population noire représente près de 5 % de la population canadienne.

Un autre défi permanent est celui de trouver les moyens de suivre les progrès vers une diversité accrue et une représentation équitable au Canada. Aux États-Unis, où le racisme fait l’objet d’une réflexion permanente en raison de la persistance d’inégalités, notamment dans le domaine de la santé et de la médecine, des données sur la race sont recueillies depuis des décennies. Toutefois, selon la Dre Simpson, cette pratique n’est pas courante au Canada, ce qui limite notre capacité à quantifier l’impact des disparités raciales en médecine et dans d’autres domaines.

La Dre Simpson affirme que la Faculté de médecine s’est engagée à promouvoir la diversité et l’inclusion, et à remédier au manque persistant de médecins des minorités raciales et d’autres médecins sous-représentés en médecine. Un domaine spécifique que le bureau d’EDI souhaite améliorer est la présence et la mise en œuvre d’une éducation et de pratiques « antiracistes et anti-oppression » dans l’ensemble la Faculté de médecine.

« Les membres du corps professoral, du personnel et les stagiaires souhaitent en savoir plus sur les questions liées au racisme et à l’oppression. Cependant, je pense qu’il existe également un malaise quant à la façon de parler de ces questions et de les aborder. Il y a beaucoup de travail à faire, mais je pense que le terrain est très fertile pour un changement positif. La Faculté est très favorable à ces changements positifs en tant qu’institution, et je suis optimiste. »

L’an dernier, l’Université d’Ottawa a lancé le premier centre de recherche consacré à l’étude des déterminants biologiques, sociaux, culturels et économiques de la santé dans les communautés noires du Canada. Entre autres priorités, ce centre se penchera sur la nécessité de s’attaquer aux disparités raciales existantes dans les soins de santé au Canada.

L’an dernier également, l’Université d’Ottawa s’est jointe à 40 établissements canadiens pour signer la Charte de Scarborough contre le racisme anti-Noir et pour l’inclusion des Noirs dans l’enseignement supérieur au Canada. Jacques Frémont, recteur et vice-chancelier de l’Université d’Ottawa, a déclaré que l’Université « s’engage à élaborer et à mettre en œuvre des solutions transformatrices concrètes pour combattre le racisme systémique envers les Noirs, et à promouvoir l’excellence et l’inclusion des Noirs dans notre pédagogie, notre recherche, notre gouvernance et l’expérience étudiante ».

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La bourse pour leaders noirs en médecine a été créée par le programme d’Études médicales de premier cycle de la Faculté de médecine en collaboration avec l’Association des étudiants noirs en médecine de l’Université d’Ottawa pour accorder une bourse à une étudiante ou à un étudiant issus d’une communauté noire et inscrits en première année de médecine à l’Université d’Ottawa.