Une équipe de l’Université d’Ottawa mène une nouvelle recherche prometteuse sur un trouble cérébral dévastateur

Par David McFadden

Rédacteur scientifique, Université d'Ottawa

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Département de médecine cellulaire et moléculaire
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Brain MRI
L’étude rigoureuse porte sur les mécanismes de la maladie de Huntington, un trouble génétique qui entraîne la dégradation des neurones dans certaines zones du cerveau.

Une nouvelle recherche menée par une équipe de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa permet de mieux comprendre les mécanismes qui sous-tendent la progression de la maladie de Huntington dans un modèle animal. Les résultats pourraient nous amener à mieux comprendre cette maladie neurologique éprouvante chez l’humain et ouvrir la voie à des cibles médicamenteuses et à des approches thérapeutiques viables.

Ces résultats pourraient s’avérer d’une grande importance, car il n’existe actuellement aucun médicament permettant de ralentir ou d’arrêter la progression de cette maladie cérébrale génétique qui touche près d’une personne sur 10 000. La maladie de Huntington (MH) détruit progressivement les neurones dans certaines zones du cerveau, ravageant petit à petit les facultés mentales du patient et provoquant des mouvements involontaires jusqu’à ce que le patient soit incapable de marcher, de communiquer ou même d’avaler. La maladie peut se transmettre d’un parent à un enfant et se manifeste généralement chez les personnes d’âge moyen.

L’étude, publiée le 13 avril dans le Journal of Neuroscience, porte sur une protéine de transport appelée VGLUT3. Dans le cerveau, cette minuscule protéine conditionne le glutamate dans des vésicules qui sont ensuite libérées par les neurones. Le glutamate est un neurotransmetteur excitateur qui intervient dans les circuits cérébraux les plus complexes. Pour que le cerveau fonctionne correctement, le glutamate doit être maintenu en quantité équilibrée. En quantité excessive, il peut entraîner l’apparition de la maladie de Huntington et d’autres affections neurologiques.

Au fil des ans, des chercheurs dirigés par le Dr Stephen Ferguson ont découvert que la protéine VGLUT3 joue un rôle étonnamment vital dans la modulation du développement de la maladie de Huntington dans le modèle murin standard. Ils ont accouplé des souris knock-out, dépourvues de la protéine de transport, avec des souris mutantes « huntingtines », afin de pouvoir effectuer des comparaisons et mettre au jour des modèles animaux de la maladie rare chez les souris mâles et femelles.

Les personnes atteintes de la maladie de Huntington présentent une forme mutée spécifique de la protéine huntingtine. Cette protéine d’échafaudage se trouve dans les cellules de tout l’organisme, mais l’anomalie génétique qui produit une version mutante ne semble avoir d’impact que sur le cerveau. Ce mutant déclenche la mort cellulaire.

Les résultats démontrant la capacité de la protéine de transport VGLUT3 à modifier la maladie sont « tout à fait remarquables », affirme le Dr Ferguson, éminent professeur au Département de médecine cellulaire et moléculaire de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa et titulaire d’une Chaire de recherche éminente en neurodégénérescence.

« Nous avons constaté un renversement complet de la progression de la maladie de Huntington chez les souris huntingtines mutantes dépourvues de la protéine VGLUT3 », explique-t-il. « De 6 à 15 mois, les souris knock-out ne se distinguaient pas des souris de type sauvage sur le plan comportemental, alors que les souris Huntington continuaient à afficher des résultats de moins en moins bons au fil du temps pour les diverses tâches motrices et cognitives évaluées. »

Dr. Stephen Ferguson
Dr Stephen Ferguson

Le seul aspect de la progression des symptômes qui n’a pas été inversé dans le modèle murin est le comportement anxieux. Mais cela aussi pourrait s’avérer d’une grande importance, car la protéine de transport (connue pour réguler des conditions telles que les troubles de l’alimentation et la toxicomanie) joue probablement aussi un rôle dans l’anxiété et la dépression.

L’un des réviseurs de l’article a qualifié les résultats globaux de « contribution substantielle » qui « devrait intéresser largement les chercheurs de la MH, ainsi que ceux qui étudient le rôle de la protéine VGLUT3 dans la cognition et le contrôle de la motricité ».

L’étude rigoureuse menée par l’Université d’Ottawa a également été choisie pour faire l’objet d’une rubrique spéciale dans le Journal of Neuroscience, une revue à comité de lecture qui publie des articles sur une vaste gamme de sujets d’intérêt pour les chercheurs dont les travaux portent sur le système nerveux.

L’auteur principal de l’article est le Dr Karim Ibrahim, un membre du laboratoire du Dr Ferguson qui vient d’obtenir son doctorat à l’Université d’Ottawa. Au cours des dernières années, il a mené méthodiquement une série d’expériences comportementales pour produire les données de l’étude. Il a notamment réalisé des tests de la tige tournante (l’un des tests classiques de la motricité chez la souris) et un test d’échelle horizontale qui, lorsque les animaux ont tenté de la traverser, a clairement mis en évidence certaines des déficiences du modèle murin Huntington.

Dr. Karim Ibrahim
Dr Karim Ibrahim

Les efforts visant à développer des cibles médicamenteuses et des approches thérapeutiques pour le traitement de la maladie de Huntington doivent tenir compte du fait que la protéine huntingtine est largement exprimée dans l’organisme.

« Il n’est pas vraiment souhaitable d’éliminer la copie de type sauvage du gène huntingtine si l’on peut l’éviter, car la protéine huntingtine est absolument essentielle », explique le Dr Ferguson. « Il vaut mieux trouver un moyen de tromper le cerveau de sorte qu’il utilise ses circuits de manière légèrement différente afin de rétablir la coordination motrice. »

C’est là l’objectif ultime des travaux menés par son laboratoire et ses collaborateurs sur la maladie de Huntington. Ils travaillent sur un ensemble d’outils pour la suppression pharmacologique de la protéine VGLUT3 et explorent les moyens de modifier potentiellement la libération de glutamate dans des sous-ensembles spécifiques de neurones.

« Nous avons montré que si l’on bloque la libération de glutamate par l’activation des récepteurs présynaptiques, on peut atténuer la maladie de Huntington », explique-t-il. « Il se peut donc que deux ou trois médicaments différents soient nécessaires pour traiter efficacement la maladie. »

Le Dr Saleh El Mestikawy, professeur au Département de psychiatrie de l’Université McGill et chercheur au Centre de recherche Douglas à Montréal, a collaboré à l’étude avec le laboratoire du Dr Ferguson.

Les travaux de recherche ont été financés par la Société Huntington du Canada et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC)

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