Pascal Audet est professeur titulaire au Département des sciences de la Terre et de l’environnement, et titulaire de la Chaire de recherche de l’Université en géophysique de la croûte terrestre, une discipline qui utilise des outils physiques comme les champs magnétiques, les ondes sismiques et la gravité pour comprendre l’intérieur de notre planète. Ses recherches portent principalement sur la sismologie; son équipe au Laboratoire de géophysique de l’Université d’Ottawa emploie des méthodes d’imagerie sismique pour étudier les zones de subduction, c’est-à-dire les points où une plaque tectonique s’enfonce sous une autre.
Les zones de subduction sont essentielles aux processus géologiques de la Terre; elles permettent le recyclage de la croûte terrestre et contribuent à la formation des chaînes de montagnes. Ces montagnes, à leur tour, modifient les systèmes météorologiques et les écosystèmes en influençant les précipitations et les courants atmosphériques.
Cependant, les zones de subduction peuvent également être dangereuses. Les plaques tectoniques se bloquent souvent en raison de la friction, ce qui entraîne une accumulation de pression. Lorsque cette pression se relâche soudainement, un « glissement » rapide se produit le long de l’interface des plaques, ce qui déclenche de puissants tremblements de terre pouvant provoquer des tsunamis et des glissements de terrain, qui comptent parmi les catastrophes naturelles les plus dévastatrices.
La plupart des zones de subduction se situent dans la ceinture circumpacifique, ou « cercle de feu du Pacifique », qui s’étend de la côte ouest des Amériques à l’Asie et à l’Océanie. Alors que certains pays de ces zones, comme le Japon et le Chili, sont bien préparés aux tremblements de terre, d’autres, comme le Canada et la Nouvelle-Zélande, n’ont jamais connu de séismes majeurs et ne sont donc pas du tout prêts en comparaison. « Nous voulons attirer l’attention sur ces régions en étudiant la probabilité que surviennent des tremblements de terre importants dans un avenir rapproché », explique Pascal Audet, qui insiste sur l’importance d’atténuer les dommages et de se préparer aux risques.
Le professeur Audet s’est associé à la professeure Martha Savage de l’Université Victoria de Wellington, ainsi qu’à Emily Warren-Smith (Ph.D.) et Katie Jacobs (Ph.D.) de GNS Science, l’organisation néo-zélandaise de recherche géologique. Avec le professeur Mladen Nedimović de l’Université Dalhousie, l’équipe a mis sur pied le projet Earthquakes and Locking InVEstigation of Subduction (ELVES).
Ce projet se concentre sur la zone de subduction de Hikurangi, située au large de l’île du Nord de la Nouvelle-Zélande, près de Wellington. À cet endroit, les plaques tectoniques sont « bloquées » et la pression s’accumule, ce qui constitue un risque sismique majeur. Pour surveiller et analyser la pression accumulée, l’équipe de recherche a déployé 20 sismomètres de fond océanique très sensibles de la National Facility for Seismological Investigations (NSFI) en novembre 2023 à bord du navire de recherche néo-zélandais Tangaroa.
Ces appareils de pointe sont conçus pour détecter les vibrations subtiles du plancher océanique. Ils sont restés en place pendant une année entière, recueillant des données précieuses jusqu’à leur récupération en janvier 2025. Une fois rechargés, les appareils sont prêts à être déployés de nouveau.

L’inactivité prolongée de cette zone de subduction fait craindre une activité sismique non détectée, mais l’analyse des données permettra de savoir si de petits tremblements de terre non détectés se produisent ou si la pression s’accumule silencieusement.
Les doctorants du professeur Audet, Taylor Tracey Kyryliuk et Quan Zhang, ont joué un rôle de premier plan dans la recherche en aidant à la préparation de l’équipement et à sa mise en service lors de la croisière de déploiement. Ils contribueront aussi grandement à la collecte et à l’analyse des données, en vue de publier un chapitre de leur thèse s’appuyant sur cet ensemble de données.
Le professeur Audet étudie également la zone de subduction de Cascadia sur la côte ouest du Canada, qui présente un comportement sismique semblable à celui de la zone de Hikurangi. Les connaissances accumulées en Nouvelle-Zélande pourraient donc être appliquées à des régions densément peuplées comme Vancouver et Seattle. En outre, les données recueillies permettront de créer un modèle tridimensionnel détaillé de la géologie de subsurface dans ces régions et d’étudier les phénomènes non sismiques, notamment les glissements de terrain sous-marins, les chants de baleines et les tempêtes océaniques.
Fait intéressant à propos du nom ELVES : Il s’agit d’un clin d’œil ludique aux acronymes formés sur le thème du Seigneur des anneaux utilisés pour désigner de précédents projets néo-zélandais, comme HOBITSS et SHIRE; le nom perpétue la tradition en y allant d’une référence créative.
Pour en savoir plus :
- Laboratoire de géophysique de l’Université d’Ottawa
- Earthquakes and Locking inVEstigation of Subduction - ELVES | uOttawa Geophysics (en anglais seulement)
- ELVES: Earthquakes and Locking inVEstigation of Subduction | East Coast LAB | Hikurangi Subduction Zone M9 (en anglais seulement)
- Sismomètres de fond océanique (en anglais seulement)
- Hikurangi Subduction Zone - GNS Science | Te Pῡ Ao(en anglais seulement)