Ses travaux les plus récents, financés par une subvention Savoir du Conseil de recherches en sciences humaines (CRSH), portent sur un sujet captivant, mais jusqu’alors inexploré : les représentations littéraires du veuvage du 19e au 21e siècle. En analysant la façon dont les veuves sont présentées dans les romans espagnols du 19e siècle, Rosalía a fait émerger des thèmes liés à la perception de la sexualité des veuves. Ce projet l’a incitée à étudier les veuves de guerre dans plusieurs œuvres littéraires, en particulier les veuves de la guerre civile espagnole et de la dictature qui a suivi la guerre. Elle a mis en lumière les dimensions politiques du deuil et de la mémoire collective en comparant le traitement qui était réservé aux veuves en fonction de leurs allégeances politiques pendant le régime fasciste : les veuves du camp victorieux étaient honorées, tandis que celles du camp défait étaient humiliées aux yeux de tous et ne pouvaient pas vivre leur deuil en public.
Rosalía se fait un devoir, dans tous ses travaux, de mettre au jour les récits méconnus. Une subvention du CRSH lui a permis de se pencher sur la presse espagnole des années 1960 et 1970 afin de mettre en lumière les contributions essentielles des femmes intellectuelles à la transition démocratique de l’Espagne, qui sont souvent mises de côté. Ses recherches ont révélé d’importantes lacunes dans le discours entourant les têtes pensantes de la société en Espagne et ont mis en évidence les importantes contributions des femmes qui ont trop longtemps été exclues de la trame narrative dominante.
En plus de mener des recherches sur le genre, Rosalía est une chercheuse très active dans le domaine des études raciales depuis 2008, année où elle a publié un recueil d’essais sur la mémoire coloniale et l’immigration, en particulier l’immigration noire au cours des premières années de démocratie de l’Espagne. Par la suite, elle a entrepris des activités d’exploration de l’identité afro-espagnole qui – en phase avec ce qui se fait dans le domaine florissant des études afro-européennes – remettaient en question l’idée que le fait noir en Espagne est un phénomène récent uniquement lié à l’immigration. Elle considère plutôt le fait noir comme profondément ancré dans l’histoire européenne. Dans la lignée de ce volet de recherche, elle examine les représentations des enfants noirs dans l’art espagnol et contribue notamment à un recueil d’essais sur l’héritage culturel de l’esclavage dans l’Espagne contemporaine. Elle s’intéresse particulièrement au cas d’une jeune esclave de l’Espagne du 18e siècle qui figure dans deux tableaux de Goya ainsi que dans un poème et plusieurs romans et films. Rosalía a analysé la façon dont les diverses représentations de cette fille ont été interprétées sous l’angle du sauveur blanc : en effet, la duchesse d’Albe, la célèbre aristocrate qui a « adopté » cette fille, a été dépeinte comme une grande bienfaitrice.
Comme la perspective transnationale et interculturelle a toujours fait partie intégrante des travaux de Rosalía, elle s’intéresse notamment à la relation entre les communautés espagnoles et afro-américaines, en particulier au 20e siècle. L’une de ses découvertes les plus intéressantes découle de son examen de la presse fasciste espagnole, qui a beaucoup parlé du mouvement des droits civiques aux États-Unis. Malgré sa nature autoritaire, la dictature espagnole a paradoxalement soutenu la lutte pour les droits des personnes afro-américaines et les libertés démocratiques. Rosalía a l’intention d’explorer l’incidence culturelle en Espagne des icônes des droits civiques des personnes afro-américaines, en particulier à la lumière du 60e anniversaire de l’assassinat de Malcolm X.
Les recherches de Rosalía occupent une place importante dans l’étude de l’origine ethnique, du genre et de la politique, à la fois en Espagne et dans des contextes transnationaux plus vastes. Ses recherches bousculent le discours consensuel, donnent une voix aux groupes marginalisés et font la lumière sur les dimensions complexes et imprévues de l’histoire culturelle et politique de l’Espagne. En remettant en question et en réinterprétant continuellement les récits dominants, Rosalía veille à faire évoluer les conversations importantes sur l’identité, le pouvoir et la mémoire.
