Engagez la conversation : rencontre avec le postdoc Nessan Akemakou Njinga

Stagiaire postdoctoral Alex Trebek (2022-2023)
Centre de droit public
Faculté de droit, Section de droit civil
Directeurs de recherche : Marie-France Fortin et Éric Champagne

Nessan Akemakou est chercheur postdoctoral au sein du Centre de droit public de l’Université d’Ottawa, sous la supervision de la professeure Marie-France Fortin et du professeur Éric Champagne. Son projet de recherche s’intitule « L’économie bleue : un concept novateur source d’irrigation des politiques publiques ? Étude croisée des Stratégies de l’économie bleue de l’Union africaine (UA) et du Canada ». Ce dernier est financé par le Forum pour le dialogue Alex Trebek.

Nessan est titulaire d’une licence en droit (LL.B), d’un master en science politique (M.A), d’un master en relations internationales (M.A) et d’un doctorat en science politique (Ph.D) de l’Université Toulouse 1 Capitole (France). Sa thèse, « L’existence d’une « paix autoritaire » en Afrique ? Une réflexion antithétique à la théorie de la paix démocratique » a été soutenue en juillet 2019.

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Parlez-nous de vous. Comment en êtes-vous venu à mener vos recherches à l'Université d’Ottawa ?

Je suis un Français de 32 ans d’origine togolaise par mon père et camerounaise par ma mère. Jusqu’au début de l’année 2022, et pendant près de 10 ans, j’ai occupé le poste d’enseignant-chercheur au sein de l’Université Toulouse 1 Capitole dans le sud de la France. J’enseignais principalement les relations internationales. L’amour ainsi que l’envie de découvrir une nouvelle terre et sa culture m’ont conduit dans la capitale du pays à la feuille d’érable en février dernier. Après une licence en droit, un master en science politique et un master en relations internationales, j’ai effectué une thèse de doctorat en Science politique soutenue le 17 juillet 2019. Au sein de cette dernière, j’explore notamment les causes de conflictualité interne en Afrique qui sont légion. Je propose également à travers une étude de cas, des pistes pour améliorer la gouvernance et limiter ces conflits. Ceux-ci sont principalement causés par l’autoritarisme, le partage inéquitable du pouvoir politique, des ressources économiques et des ressources naturelles, dont l’eau. L’accès à l’or bleu est en effet un motif de belligérance entre populations nomades et sédentaires dans les régions en proie à la désertification et à la multiplication des sécheresses.

Une amie m’a envoyé l’appel à candidature pour un postdoctorat au sein du forum sur le droit et la gouvernance de l’eau de l’Université d’Ottawa. J’ai postulé avec entrain car l’Université d’Ottawa est renommée pour sa qualité scientifique et son environnement multiculturel permettant à la diversité de s’épanouir sereinement. J’ai eu la joie d’être retenu par la professeure Marie-France Fortin que je remercie encore pour sa confiance.

Je suis par ailleurs le président de L’Afrique des idées (L’ADI), un think tank qui a pour vocation d’alimenter le débat public en Afrique à travers la production d’analyses et l’organisation de conférences de vulgarisation tant en France qu’en Afrique.

Parlez-nous du sujet de votre recherche. Sur quoi travaillez-vous ?

Le 4 avril 2022 est paru le dernier volet du 6ème rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Il rappelle avec vigueur l’urgence d’agir afin de limiter le réchauffement de la planète et les dérèglements climatiques subséquents. Sans mesures impérieuses, l’humanité va à vau-l’eau. Dans l’éventail des solutions innovantes dégagées au niveau international afin de limiter autant que faire se peut ces perturbations, l’économie bleue a attiré mon attention eu égard à mes intérêts de recherche.

Ce concept demeure toutefois insuffisamment défriché tant académiquement que politiquement. La Banque mondiale (BM) définit l’économie bleue comme étant l’exploitation durable des ressources dans les océans à des fins de croissance économique, d’amélioration des moyens de subsistance, de création d’emplois et de préservation de la santé des écosystèmes océaniques.

L’Afrique n’est responsable que de 4 % des émissions des gaz à effet de serre, mais ses populations subissent grandement les effets du dérèglement climatique. L’Union africaine (une organisation d’intégration continentale) a identifié le concept d’économie bleue comme un outil pouvant contribuer à la lutte contre les changements climatiques. En 2019, elle a formulé une stratégie de l’économie bleue opérationnelle pour l’Afrique. Celle-ci devant servir de canevas pour l’élaboration de politiques nationales et régionales.

Le Canada fait partie des nations phares en matière de protection et conservation des océans. Fort de son imposant littoral (250 000 km) et de ses côtes bordées par trois océans, il ambitionne de devenir un chef de file dans la mise en œuvre du concept d’économie bleue. À cette fin, Ottawa est actuellement en train d’élaborer une Stratégie de l’économie bleue.

Dans le cadre de ma recherche postdoctorale, j’étudie et je compare les stratégies panafricaine et pancanadienne.

Qu'espérez-vous accomplir pendant votre stage à l'Université d'Ottawa ?

Je compare les stratégies panafricaine et pancanadienne. J’aimerais surtout apprécier leurs processus d’élaboration sachant que l’une est aboutie et que l’autre est en cours de construction. Il sera subséquemment intéressant de voir si la méthodologie utilisée par les autorités panafricaines peut seoir au Canada et quelles leçons peuvent être tirées en matière d’amélioration de la gouvernance globale de l’eau. Le Canada peut-il s’inspirer de l’Afrique ? Et l’Afrique peut-elle parfaire sa stratégie en s’inspirant du Canada ?

Par le biais de cette recherche, je souhaite contribuer à l’avancement des savoirs et à mettre en avant les contributions positives de l’Afrique sur la scène internationale et pour l’humanité.

Qu'est-ce qui influence votre travail ?

La qualité de mon travail est influencée par l’environnement au sein duquel j’évolue. Ainsi la qualité des infrastructures est importante tout comme celle de l’encadrement. Un environnement de travail sain et bienveillant m’apparaît primordial.

Avez-vous des conseils pour ceux et celles qui sont en train de terminer leur doctorat ?

Je leur souhaite d’abord du courage car la thèse est une belle aventure, mais elle n’est pas toujours évidente. Ensuite, je conseillerai à celles et ceux qui se destinent à une carrière académique, de publier autant que faire se peut et de participer à des évènements scientifiques. Les postdocs notamment à l’étranger pour avoir une expérience internationale sont idéaux à cet égard. S’ils/elles se destinent à une carrière non académique, qu’ils/elles essayent de voir dès à présent comment valoriser leurs nombreux acquis dans un autre secteur d’activité. Enfin, ils/elles devraient prendre le temps de savourer le jour de leur soutenance et d’apprécier ces moments uniques et précieux entourés de leur famille et de leurs ami(e)s.

Avez-vous des publications que vous aimeriez partager avec notre communauté ?

Quels sont les trois mots qui vous décrivent le mieux ?

Courtois, jovial, persévérant.

Que lisez-vous actuellement ?

Une vie de boy de Ferdinand Oyono et La disparition de Stéphanie Mailer de Joël Dicker.

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