Parlons de diversité de genre et d’inclusion dans les écoles canadiennes

Faculté d'éducation
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Éducation

Par Christine L. Cusack

Communications, Faculté d'éducation | Faculty of Education, uOttawa

Dessin au trait représentant un groupe diversifié de personnes
C’est le début d’un temps nouveau et fragile, affirme Lee Airton, qui enseigne les questions de genre et de sexualité en éducation à l’Université Queen’s. Bien que la société s’habitue aux conversations sur l’expression de genre, l’identité de genre et les pronoms, la polarisation du discours public sur la diversité de genre dans les écoles s’intensifie dans beaucoup d’endroits.

Partout au pays en cette rentrée scolaire, le personnel enseignant travaille fort pour créer un climat plus accueillant pour l’ensemble des élèves. L’inclusion des personnes 2SLGBTQIA+ est cruciale non seulement pour le bien-être des élèves, explique Lee Airton, mais aussi pour la création de milieux scolaires accueillants pour la direction, le personnel enseignant et les familles. À l’invitation du programme de Teacher Education de la Faculté d’éducation, Airton présente les dernières études et réflexions sur la diversité sexuelle et de genre lors d’activités de perfectionnement destinées aux personnes candidates au baccalauréat en éducation de l’Université d’Ottawa. Ces présentations sont conçues pour amener les recrues en enseignement à mieux comprendre les changements positifs qu’elles peuvent apporter dans les écoles canadiennes.

Côtoyer la diversité

Selon Airton, l’enseignement est un métier générationnel : l’expérience du personnel enseignant change au fil du temps. La cohorte actuelle de stagiaires en éducation est mieux renseignée sur la diversité sexuelle et de genre. Elle est aussi régulièrement exposée à cette réalité au quotidien. Elle emploie même un nouveau vocabulaire par rapport aux générations précédentes, affirme Airton. En effet, les membres des générations Y et Z (les personnes entre la mi-vingtaine et la mi-trentaine) emploient aisément le pronom singulier they en anglais ou le pronom iel en français. Or dans certains cas, leurs collègues moins jeunes découvrent à peine la réalité trans et la langue inclusive. « De nos jours, même les stagiaires cisgenres côtoient des personnes trans et connaissent mieux leur réalité, indique Airton. Ainsi, les prochaines cohortes de stagiaires et de recrues en enseignement seront de mieux en mieux renseignées sur le vécu et les défis des personnes trans. »

Genre et éducation : un passé difficile

En matière de genre, les écoles publiques n’en sont pas à leur première controverse. Lee Airton raconte que sa mère, enseignante au primaire, a été victime de discrimination en Colombie-Britannique dans les années 1960 et au début des années 1970. À l’époque, les codes vestimentaires genrés obligeaient les enseignantes à porter des talons hauts, même lors de sorties où elles surveillaient 40 enfants. Quand sa grossesse est devenue visible, la mère d’Airton a dû démissionner, comme une multitude de femmes avant elle. En effet, les départs forcés pour cause de grossesse visible étaient monnaie courante. La profession enseignante a toujours cherché à contrôler le corps et l’expression de genre de ses membres, explique Airton, notamment en déployant des efforts concertés pour « exclure les personnes de genre non conforme ».

Lee Airton
Lee Airton prononce un discours d'ouverture pour la population étudiante du programme Teacher Education à l'Université d'Ottawa.

Changement générationnel et ouverture à la différence

Heureusement, les mentalités changent dans tout le secteur de l’éducation, tant chez les élèves que chez le personnel enseignant. « Pour la première fois dans l’histoire de la profession, les personnes trans et/ou de genre non conforme (y compris les personnes cisgenres) peuvent envisager sérieusement une carrière en enseignement primaire ou secondaire », se réjouit Lee Airton.

Un avenir inclusif

En 2017, Lee Airton a écrit une page d’histoire en devenant la première personne ouvertement trans à décrocher un poste professoral menant à la permanence dans une faculté d’éducation canadienne. Son expertise et son vécu intéressent énormément les conseils scolaires, les organismes gouvernementaux et le secteur privé. En dehors du monde de l’éducation, Airton dit recevoir beaucoup d’invitations de personnes queers ou trans qui veulent changer la culture de leur nouveau milieu de travail, et de parents qui craignent que leurs enfants trans reçoivent un mauvais accueil et peinent à décrocher un emploi. « Ces parents veulent envisager un avenir pour leurs enfants », explique Airton.

Pour la première fois de notre histoire, souligne-t-iel, les parents d’enfants trans forment un groupe et s’identifient ouvertement comme tels. Les travaux d’Airton visent principalement à élargir les horizons des membres de la génération X, à laquelle appartiennent la majorité des directions d’école au Canada. « La discrimination fondée sur l’expression de genre est une atteinte aux droits de la personne, rappelle Lee Airton, mais certaines personnes ont de la difficulté à apprivoiser le changement. » 

Des ressources qui favorisent l’inclusion

On n’insistera jamais assez sur l’importance d’amener le personnel enseignant, toutes générations confondues, à promouvoir l’inclusion. Lee Airton travaille beaucoup en ce sens. Outre son populaire site Web gegi.caet son récent recueil Teaching about Gender Diversity: Teacher-Tested Lesson Plans for K-12 Classrooms,une foule de ressources facilitent la création d’un climat accueillant pour tout le monde.

Pour opérer un changement durable, il faut du temps et de la persévérance. « Tout le monde doit y mettre du sien », conclut Airton.


 

Biographie

Lee Airtonenseigne les questions de genre et de sexualité en éducation à l’Université Queen’s. Ses recherches portent sur la façon dont les dispositions législatives interdisant la discrimination fondée sur l’identité et l’expression de genre sont intégrées aux programmes scolaires de la maternelle à la 12e année et à la formation du personnel enseignant. En 2012, iel a fondé le blogue They Is My Pronoun, la première foire aux questions sur l’emploi de pronoms épicènes et le soutien aux personnes concernées, visité par plus de 30 000 personnes pendant la seule année 2017. En 2016, iel a lancé No Big Deal, une campagne pancanadienne sur les réseaux sociaux invitant les gens à montrer leur solidarité avec les personnes trans qui revendiquent leur droit d’être désignées par les pronoms de leur choix. En 2021, Airton et son équipe de recherche ont lancé gegi.ca [prononciation : dji-dji-point-c-a], la première ressource bilingue d’autodéfense des droits destinée aux élèves de la maternelle à la 12e année qui sont victimes de discrimination fondée sur leur expression ou leur identité de genre. Le premier ouvrage d’Airton, Gender: Your Guide, un guide pratique sur les façons d’accueillir la diversité de genre au quotidien, est devenu une lecture incontournable dans les programmes de formation du personnel enseignant, les conseils scolaires, la fonction publique et le secteur privé. Iel a accordé plus de 65 entrevues au Canada et à l’étranger sur les questions de diversité de genre et a prononcé en 2022 la conférence principale de l’Association canadienne pour la formation des enseignants, une première pour une personne en début de carrière universitaire.