Tube à essai contenant des eaux usées.
Grâce à une nouvelle subvention de Génome Canada et du programme Alliance du CRSNG pour la surveillance des eaux usées, Robert Delatolla et son équipe de la Faculté de génie de l’Université d’Ottawa font avancer les connaissances en santé publique au Canada en utilisant les données sur les eaux usées pour dépister les maladies émergentes et améliorer l’équité en matière de santé.

Robert Delatolla, professeur au Département de génie civil de l’Université d’Ottawa, est titulaire de la chaire en santé publique appliquée des IRSC en environnement, changement climatique et « Une seule santé ». Il a façonné notre façon d’intervenir en cas de menaces pour la santé publique. 

Le professeur Delatolla est connu pour son leadership dans l’utilisation des eaux usées pour surveiller la prévalence de la COVID-19 au plus fort de la pandémie. Son groupe de recherche a récemment obtenu d’importantes subventions de Génome Canada et du programme Alliance du CRSNG qui, combinées à d’autres sources de financement, lui permettront d’élargir la portée de la recherche sur la surveillance des eaux usées dans l’ensemble du Canada.

Le travail de l’équipe, qui s’appuie sur des années de recherche en génie appliqué et une collaboration importante avec le secteur de la santé, aide les communautés à faire face aux menaces sanitaires émergentes en utilisant les eaux usées, un outil puissant pour obtenir des renseignements en temps réel sur la santé publique. 

D’une intervention de crise à une collaboration à long terme

Lorsque la pandémie de COVID-19 a frappé, le groupe de recherche du professeur Delatolla a rapidement changé de cap et mis au point un système de surveillance des eaux usées. Mais la transition ne se limitait pas à des aspects techniques; elle s’appuyait sur une solide collaboration. « Nous avons eu beaucoup de chance de travailler avec nos partenaires de la santé publique, particulièrement l’équipe de Santé publique Ottawa, qui a souvent orienté nos questions de recherche et qui s’est efforcée de créer de nouveaux mécanismes pour intégrer et exploiter les données générées sur les eaux usées », explique le professeur.

En collaborant étroitement avec les agences de santé publique de l’Ontario, du Canada et d’ailleurs, l’équipe a pu cerner les lacunes en matière de connaissances et adapter ses recherches aux besoins réels. Cette approche a énormément contribué à faire de la surveillance des eaux usées un élément fiable du plan de réponse à la pandémie.

L’expérience a également permis au professeur Delatolla et à son équipe de constater toute l’importance de travailler de manière agile. « Il peut être intimidant de se lancer dans un nouveau domaine, de se pencher sur de nouvelles connaissances et de travailler avec des spécialistes de ces nouveaux savoirs, affirme-t-il. Mais nos partenaires de la santé publique ont accueilli notre équipe avec enthousiasme, ce qui nous a permis d’utiliser autrement nos compétences en infrastructure et analyse des eaux usées. »  

Le soutien de la communauté, des institutions et du public a été essentiel au groupe lorsqu’il travaillait à créer des systèmes de surveillance aux échelles municipale, provinciale et nationale. « C’est ce qui a maintenu notre équipe à flot dans les conditions difficiles des premiers mois de la pandémie », dit-il. 

Favoriser l’équité et prévenir les menaces futures

Grâce au nouveau financement obtenu, le groupe du professeur Delatolla souhaite maintenant élargir la portée et l’impact de ces techniques.

« Notre équipe est déterminée à utiliser la surveillance des eaux usées pour promouvoir l’équité en matière de santé et fournir des renseignements accessibles qui aident les communautés au quotidien », déclare-t-il.

L’un de ses principaux objectifs est d’utiliser la technologie pour aider les communautés prioritaires, notamment celles où l’accès aux soins de santé est limité ou dont les membres hésitent à demander des examens ou des soins médicaux. Selon le professeur Delatolla, ces groupes sont parmi ceux qui ont été les plus durement touchés pendant la pandémie.

Robert Delatolla.
Research & Innovation

«  Notre équipe est déterminée à utiliser la surveillance des eaux usées pour promouvoir l’équité en matière de santé et fournir des renseignements accessibles qui aident les communautés au quotidien. »

Robert Delatolla

— Professeur, Département de génie civil

L’équipe dirige plusieurs nouveaux projets :

  • la mise en œuvre de systèmes de surveillance des eaux usées dans des communautés autochtones du Nord, grâce à une subvention du programme Alliance du CRSNG, en collaboration avec l’Université Laval;
  • le suivi des maladies à transmission vectorielle découlant des changements climatiques, tant dans les communautés des Premières Nations du Sud que celles plus éloignées du Nord, grâce à une initiative financée par Génome Canada;
  • le suivi de la grippe aviaire en Ontario, au Québec et en Colombie-Britannique grâce à une subvention Catalyseur des IRSC, en collaboration avec le Centre de contrôle des maladies de la Colombie-Britannique et l’Institut national de santé publique du Québec.

Basés sur les connaissances acquises durant la pandémie, ces projets visent à améliorer et à déployer des outils de suivi des eaux usées ainsi qu’à favoriser une prise de décision plus inclusive en matière de santé publique. À l’échelle locale, le professeur Delatolla travaille avec le CHEO, l’Institut de recherche du CHEO et Santé publique Ottawa pour continuer à surveiller la COVID-19, l’influenza, le VRS et la variole simienne au moins jusqu’en septembre 2025. Compte tenu de l’augmentation du nombre de cas de rougeole et des préoccupations liées à la grippe aviaire, son équipe espère élargir davantage la portée du programme. « Il est essentiel de continuer à surveiller les eaux usées dans notre ville à l’heure actuelle », affirme le professeur. 

La prochaine étape pour la surveillance des eaux usées

Le professeur Delatolla considère que la surveillance des eaux usées est un outil de santé publique qui évolue rapidement, notamment en ce qui a trait au développement de nouveaux tests et méthodes d’analyse. Son groupe a d’ailleurs mené récemment des travaux visant à détecter et à génotyper la rougeole dans les eaux usées, et l’approche est déjà mise à l’essai à Ottawa.  

Toutefois, certains défis demeurent, comme la manière dont les agences de santé publique interprètent et utilisent les données. « Certaines lacunes en matière de connaissances limitent l’adoption de ces méthodes, particulièrement en ce qui concerne l’intégration des résultats d’analyse des eaux usées dans les pratiques actuelles de santé publique et de soins de santé. »

Pour combler ces lacunes, le groupe de recherche a recruté des spécialistes des statistiques et des mathématiques qui travaillent à optimiser l’utilisation des données sur les eaux usées et à faciliter leur mise en application dans des contextes réels en santé publique.

Après avoir travaillé au suivi régulier de la pandémie, l’équipe revient maintenant à son rôle plus axé sur la recherche. Cela dit, sa mission demeure la même : construire des systèmes qui génèrent des données sur la santé ouvertes et accessibles à tout le monde, particulièrement sur les populations les plus à risque.