Comprendre et combattre les effets du stress sur le cerveau et la santé mentale

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Santé mentale
Docteure Nafissa Ismail parle avec une étudiante dans un laboratoire
La docteure Nafissa Ismail, professeure à l’École de psychologie de l’Université d’Ottawa, explique les effets et les conséquences du stress sur le corps et le cerveau, ainsi que les façons de s’en prémunir.

Le stress, nous le vivons toutes et tous à divers degrés. Il fait d’ailleurs partie du quotidien de bon nombre d’entre nous. Or, une exposition prolongée entraîne des effets importants dans le corps et le cerveau. Un constat d’autant plus inquiétant en cette période de pandémie, alors que les sondages démontrent une hausse du niveau de stress dans la population, ainsi qu’une augmentation des troubles psychologiques qui y sont liés. Heureusement, il est possible de vous prémunir contre les effets néfastes du stress. 

La Dre Nafissa Ismail, professeure à l’École de psychologie de l’Université d’Ottawa, a récemment abordé le sujet lors d’une entrevue menée par la diplômée Gwen Madiba, animatrice du balado uOCourant.

« Ce que l’on vit actuellement avec la COVID-19 est difficile et les circonstances peuvent être particulièrement éprouvantes pour les personnes qui souffrent déjà de troubles de santé mentale », explique Dre Ismail. 

En tant que titulaire de la Chaire de recherche sur le stress et la santé mentale, elle analyse notamment les changements cérébraux attribuables au stress. 

Comprendre le stress d’un point de vue biologique

En réponse à un stresseur, le corps, par le biais des glandes surrénales, sécrète une hormone nommée cortisol. Cette hormone sera libérée tant que la situation sera perçue comme alarmante. « Si un niveau élevé de cortisol se retrouve dans l’organisme sur une période prolongée, on augmente le risque de développer des troubles de dépression, d’anxiété ou de stress post-traumatique », partage Dre Ismail. 

Elle enchaîne en précisant qu’une présence prolongée du cortisol dans notre corps vient notamment augmenter la perméabilité de la membrane hématoencéphalique. Cette membrane protège habituellement le cerveau en l’isolant de ce qui se passe en périphérie dans le corps. En devenant plus perméable, elle laisse passer les protéines inflammatoires du corps vers le cerveau, ce qui crée de la neuroinflammation. Ainsi, la neuroinflammation vient remodeler le cerveau, en changeant sa structure et son fonctionnement, en particulier dans trois régions très sensibles : l’hippocampe, le cortex préfrontal et l’amygdale.  

L’hippocampe joue un rôle important dans l’apprentissage et la mémoire. Sous l’effet d’un stress prolongé, cette région rétrécit et cause des troubles de mémoires et des difficultés d’apprentissage. Cette diminution du volume de l’hippocampe peut aussi entraîner l’apparition de symptômes de dépression.

Du côté du cortex préfrontal, le stress chronique ralentit l’activité et vient altérer la prise de décision, la résolution de problèmes, la concentration et la planification. 

L’activité dans l’amygdale quant à elle, augmente en conséquence au stress. La régulation des émotions s’en trouve alors affectée. « C’est ainsi qu’on voit apparaître plus d’anxiété chez les personnes qui vivent du stress chronique », précise Dre Ismail.

Heureusement, les recherches démontrent que ces effets sur le cerveau sont réversibles et évitables.

Protéger son cerveau et sa santé mentale face au stress

« La meilleure façon de protéger notre cerveau et de le rendre plus résilient face aux périodes d’angoisse est d’apprendre à gérer notre stress de façon saine, afin de diminuer la production de cortisol et l’inflammation », partage Dre Ismail.

Bien qu’il soit souvent difficile de contrôler l’environnement dans lequel on se trouve, il est possible de modeler notre attitude pour ainsi diminuer l’impact sur soi et rétablir l’équilibre. « Une étape importante est de reconnaître qu’une situation est stressante parce qu’on la perçoit ainsi. Le simple fait de se rappeler qu’il s’agit d’un événement temporaire et que la tempête finira par passer aide à construire la résilience », précise Nafissa Ismail.

Selon elle, s’organiser permet aussi de rétablir ce sentiment de contrôle dont nous avons besoin. Pour franchir une étape à la fois, il s’agit de planifier son temps et prévoir les tâches à accomplir selon un échéancier. Cela nous permet généralement de prendre un peu de recul pour y voir beaucoup plus clair. 

Le sommeil s’avère aussi un important allié face aux aléas de la vie. Dre Ismail propose de mettre en pratique diverses techniques de relaxation afin de favoriser un sentiment de calme avant d’aller au lit. On peut ainsi limiter les nuits d’insomnies qui accompagnent généralement les périodes de bouleversement. 

Enfin, le soutien et l’écoute font partie des outils de taille pour surmonter les épreuves. Faire part de ses préoccupations à une personne de confiance contribue à l’apaisement. La docteure Ismail conclut donc en nous rappelant l’importance de ne jamais hésiter à aller chercher de l’aide