En Ontario, une tendance inquiétante se dessine : plus de 50 % des enseignantes et enseignants de FLS en début de carrière ont déjà envisagé de quitter la profession. Et s’il y avait un moyen de les encourager à rester?
C’est la question fondamentale qui sous-tend les travaux de la professeure Stephanie Arnott. Cette dernière s’intéresse particulièrement aux moyens de soutenir les enseignantes et enseignants de FLS, et d’augmenter l’effectif pour assurer l’enseignement du français au Canada. Grâce au financement du ministère de l’Éducation de l’Ontario, la professeure Arnott dirige le projet FLS Challenge, une nouvelle phase de recherche qui s’appuie sur de précédentes initiatives, dont ReadyFSL et le projet sur la formation des enseignants de FLS.
La pénurie de personnel enseignant de FLS s’aggrave depuis plusieurs années, et d’après les recherches de la professeure Arnott, la rétention commence dans les facultés d’éducation. « Le moyen le plus efficace de recruter et de retenir plus d’enseignantes et d’enseignants de FLS, c’est de bâtir des communautés de FLS dynamiques et solidaires en collaboration avec les facultés d’éducation et les conseils scolaires locaux, notamment les administratrices et administrateurs, et les enseignantes et enseignants de FLS », explique-t-elle.
Réseautage et appartenance à une communauté
Ce printemps et cet été, Stephanie Arnott et ses collègues Ryan Furlong (M.A. 2024) et Adam Kaszuba (Ph.D. 2025) ont tenu deux séances de travail aussi intéressantes que productives à Ottawa. Elles ont réuni des personnes enseignant le FLS ayant déjà occupé des postes de professeur détaché ou d’enseignant associé, des administratrices et administrateurs clés de programmes de FLS de l’Ottawa-Carleton District School Board et de l’Ottawa Catholic School Board, des candidates et candidats de première et deuxième année à la formation en enseignement du FLS et des membres chevronnés de l’équipe du programme de formation à l’enseignement à la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa. Ces rencontres visaient à définir une vision commune de l’articulation entre la formation et la rétention du personnel enseignant de FLS et à trouver des moyens concrets de bâtir des communautés pour les soutenir.


L’un des principaux objectifs du projet FLS Challenge est de favoriser les occasions, pour les partenaires communautaires et de recherche, de se réunir, de parler de leurs difficultés et d’établir une compréhension commune du système de formation du personnel enseignant de FLS. C’est justement ce que les séances de travail ont permis de faire en offrant à la fois un espace où réseauter de façon informelle, rafraîchissement à la main, et un cadre de collaboration officielle avec des activités de formation structurées.
Qu’est-ce qui est ressorti de ces conversations? Selon la professeure Arnott, il y a une passion collective à l’Université d’Ottawa pour la formation et la rétention du personnel enseignant de FLS.
« Une autre valeur commune qui s’est dégagée de ces rencontres, c’est l’ouverture aux divers rôles que jouent les membres de la communauté dans notre programme de formation à l’enseignement. Et tout le monde s’est entendu sur le fait qu’il faut prioriser la rétention dès l’entrée des futurs enseignants et enseignantes de FLS dans le programme », poursuit-elle.
Pour Kasjuba, ces sessions ont été l'occasion d'élargir ses horizons. « Travailler avec Stephanie, Ryan et toutes les personnes qui ont participé aux sessions m'a ouvert les yeux sur une autre façon d'aborder des défis tels que la rétention des enseignants de FSL », explique-t-il.
« Au cœur de cette approche se trouve, bien sûr, la communauté. Stephanie a fait un travail incroyable pour créer une atmosphère détendue et accueillante lors de ces événements. Grâce à cette initiative, j'ai pu nouer des liens avec des personnes avec lesquelles je n'aurais probablement jamais eu l'occasion d'interagir autrement. »

Le stage, un élément essentiel
Une analyse des activités de formation officielles menée lors des deux séances a révélé que le facteur qui influait le plus sur les apprentissages et la rétention du personnel enseignant de FLS était le stage. Par conséquent, les initiatives visant à soutenir les personnes candidates à la formation en enseignement du FLS devraient être axées sur l’enrichissement de l’expérience de stage et des mesures d’appui connexes (mentorat, co-planification, co-enseignement).
La vision « fonctionnelle » de ces séances est résumée dans une infographie ayant pour thème « Naviguer ensemble dans la marée montante ». Créée à partir de données probantes, cette aide visuelle permet aux membres de la communauté de l’enseignement du FLS et à leurs partenaires de bien comprendre le contexte actuel, et elle répond à la question directrice suivante : « Comment renforcer les apprentissages et la rétention du personnel enseignant de FLS? »
Parmi les « piliers » favorisant l’apprentissage et la réussite à long terme des enseignantes et enseignants de FLS, on trouve le mentorat et les relations. « Notre communauté d’enseignement du FLS travaille, pour sa part, à élargir sa façon de voir comment le mentorat peut soutenir trois grands thèmes cernés lors des discussions : la formation des correctrices et correcteurs du DELF pendant la formation à l’enseignement du FLS; les exigences relatives aux cours de français; et les tests de compétences linguistiques en français », explique la professeure Arnott.

Poursuivre sur une lancée
« En tant que professeure à la Faculté d’éducation, j’ai trouvé que la création d’une communauté axée sur la formation du personnel enseignant de FLS ici même, à l’Université d’Ottawa, a été une expérience des plus enrichissantes », ajoute Stephanie Arnott.
« C’est véritablement transformateur – le pouvoir des relations et de la recherche collaborative sur la rétention à long terme des enseignantes et enseignants de FLS est indéniable. Dans nos écoles ou nos facultés, l’enseignement du FLS n’est plus un programme où on travaille en vase clos. Collaborer comme ça permet aux gens de s’investir dans leur passion pour le FLS et nous motive à travailler ensemble en faveur de la rétention. Voir les gens tisser entre eux des liens enrichissants lors des deux activités a été un véritable privilège. J’espère poursuivre cette initiative pendant encore plusieurs années », conclut-elle.

À propos de Stephanie Arnott
Stephanie Arnott est professeure agrégée à la Faculté d’éducation, membre du groupe de recherche EducLang et co-coordinatrice du programme d’enseignement des langues secondes en partenariat avec l’Institut des langues officielles et du bilinguisme. Ses travaux sont axés sur l’enseignement des langues secondes et sur le recrutement et la rétention du personnel enseignant de FLS. Dans un article sur les cultures de l’expérimentation dans la formation des enseignantes et enseignants de français langue seconde (FSL) au Canada (à paraître dans La Revue canadienne des langues vivantes), la professeure Arnott et ses collègues parlent des mesures que prend la Faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa pour répondre à la pénurie d’enseignantes et enseignants de FLS.