Imaginez une montre intelligente capable de détecter l’anxiété ou un assistant virtuel qui reconnaît la détresse émotionnelle chez une personne avant même qu’elle ne dise un mot.
Ce sont là certaines des possibilités explorées par Karim Alghoul, professeur à temps partiel à l’École de science informatique et de génie électrique, qui concentre ses recherches sur l’informatique affective, un domaine émergent redéfinissant la manière dont les humains et les ordinateurs interagissent.
« La technologie occupe une place importante dans notre quotidien, mais elle a rarement la capacité de comprendre ce que nous ressentons, explique-t-il. Mes recherches portent sur ce lien et visent à mettre au point des systèmes capables de reconnaître les émotions humaines afin que la technologie devienne plus réactive, plus intuitive et, finalement, plus centrée sur l’être humain. »
Amener les machines à avoir une intelligence émotionnelle
L’informatique affective apprend aux machines à reconnaître les signaux émotionnels et à y réagir grâce à une combinaison de données sur les expressions faciales, le ton de la voix, le rythme cardiaque et d’autres signes physiologiques.
Les travaux du professeur Alghoul utilisent l’intelligence artificielle, le traitement de signaux et les technologies portables pour explorer les moyens d’accroître l’intelligence émotionnelle des ordinateurs.
L’objectif? Réduire la différence émotionnelle entre l’être humain et la machine, et créer une technologie capable d’interagir d’une façon qui semble plus naturelle. Ces systèmes sensibles aux émotions pourraient contribuer à rendre les interactions numériques plus fluides, plus intuitives et plus utiles à notre vie quotidienne.

« Mes recherches [...] visent à mettre au point des systèmes capables de reconnaître les émotions humaines afin que la technologie devienne plus réactive, plus intuitive et [...] centrée sur l’être... »
Karim Alghoul
— Professeur à temps partiel, École de science informatique et de génie électrique
La technologie pourvue d’une intelligence émotionnelle dans les soins de santé
Les applications des recherches de Karim Alghoul sont particulièrement prometteuses dans le domaine des soins de santé.
En effet, le professeur étudie comment les technologies portables, comme les montres intelligentes, peuvent détecter différents états émotionnels, comme le stress et la dépression. En détectant et en surveillant les signes de stress et les changements émotionnels chez la patientèle au fil du temps, ces appareils peuvent fournir des informations précieuses aux personnes qui les portent et au personnel de santé.
La technologie pourrait aussi détecter les signes avant-coureurs de troubles mentaux chez les personnes âgées, sans qu’une surveillance constante soit nécessaire.
Le professeur Alghoul travaille également sur des systèmes qui utilisent des caméras pour surveiller la fréquence cardiaque et d’autres données par l’analyse des expressions faciales. Ce type de technologie sans contact est une option novatrice pour les patientes et patients qui souffrent de brûlures, de lésions cutanées ou d’autres affections qui les empêchent de porter les dispositifs traditionnels.
Ces systèmes pourraient même aider le personnel des urgences à repérer rapidement les personnes qui sont en détresse émotionnelle et qui ont besoin de soins urgents.
Au service de la santé mentale
Karim Alghoul travaille aussi à la mise au point d’un assistant personnel en psychothérapie qui détecte les émotions grâce aux signes physiologiques et exploite les capacités des grands modèles de langage, comme ChatGPT.
L’assistant ne se contente pas d’attendre que l’utilisatrice ou l’utilisateur lui parle : il peut lancer des conversations en fonction des signaux émotionnels détectés. L’idée est d’offrir un système d’aide plus humain et plus réactif aux personnes éprouvant du stress, de l’anxiété ou un épuisement émotionnel.
Cette approche novatrice qui combine l’intelligence émotionnelle et le traitement du langage naturel ouvre la porte à la création d’outils numériques de soins en santé mentale plus proactifs et empathiques.
Recherche et collaboration axées sur l’être humain
Les travaux du professeur Alghoul sont ancrés dans la collaboration. À l’Université d’Ottawa, il mène ses recherches sous la direction d’Hussein Al Osman, professeur agrégé et responsable du groupe de traitement et d’interaction multimédia, et d’Abdulmotaleb El Saddik, professeur éminent et titulaire de la Chaire de recherche universitaire sur les environnements interactifs ambiants. Le professeur El Saddik est aussi directeur du Laboratoire de recherche sur les communications multimédias.
Pour sa part, le professeur Alghoul est candidat au doctorat et possède une expérience professionnelle dans le secteur des télécommunications. Il apporte donc à ses recherches expertise universitaire et connaissance du secteur.
Il prévoit de mettre au point un prototype fonctionnel et de collaborer plus étroitement avec des spécialistes de la psychologie pour que les interventions de ses systèmes d’IA dotés d’une intelligence émotionnelle soient adéquates, éthiques et fondées sur de véritables comportements humains.
Vers un avenir numérique plus empathique
À la Faculté de génie de l’Université d’Ottawa, des chercheuses et chercheurs comme Karim Alghoul s’affairent à développer des technologies et des systèmes d’IA dotés d’une intelligence émotionnelle qui seront en mesure d’améliorer nos vies. L’informatique affective est encore un domaine en expansion, mais nous voyons déjà ses effets.
Cherchant autant à améliorer le soutien offert en santé mentale qu’à mettre au point de meilleurs outils d’apprentissage, les travaux du professeur Alghoul dans le domaine de l’informatique affective et des technologies sensibles aux émotions contribuent à façonner un avenir où les machines seront capables de comprendre les données… mais les gens également.