Près d’un million d’enfants et de jeunes ayant un handicap fréquentent les écoles canadiennes. Parmi eux, un nombre croissant fait face à des problèmes de santé mentale, ce qui contribue à accroître le taux d’absentéisme chez les élèves ayant des besoins complexes. Malheureusement, les écoles ne disposent pas toujours des ressources nécessaires pour les aider. L’un des objectifs clés des travaux menés par la professeure Jess Whitley, titulaire de la Chaire de recherche de l’Université sur l’inclusion, la santé mentale et l’assiduité scolaire, est de garantir aux élèves vulnérables l’accès à des milieux éducatifs inclusifs.
De l’importance de l’assiduité scolaire
« Les écoles sont des lieux où tous les élèves, y compris ceux ayant un handicap, peuvent recevoir l’aide et les services dont ils ont besoin pour réussir, interagir dans des contextes culturels et sociaux variés, s’exposer à de nouvelles idées, acquérir de nouvelles compétences et développer un sentiment d’appartenance. Les enfants qui s’absentent régulièrement sont privés de ces occasions », explique la professeure Whitley.
« L’absentéisme est un facteur de risque précoce du décrochage et d’une foule d’autres difficultés financières et scolaires et troubles de santé mentale. Les problèmes de fréquentation scolaire sont souvent des signes avant-coureurs qui permettent aux écoles et aux organismes de santé mentale de repérer les difficultés bien avant que les autres signaux ne deviennent visibles », ajoute-t-elle.
Un modèle de partenariat entre la communauté et l’université
C’est de la volonté de mieux comprendre les racines complexes de l’absentéisme qu’est née la collaboration entre la professeure Whitley et le Centre de santé mentale pour enfants Crossroads (CCMHC). Cette organisation locale offre gratuitement des services de santé mentale à plus de 2000 familles et enfants anglophones et francophones de la région d’Ottawa. Inspiré par la devise « Aide aux enfants. Espoir pour les familles », le Centre propose de nombreuses activités variées, notamment des services à l’école et à domicile et des plans de traitement personnalisés pour les enfants et les familles. Toutes les initiatives du CCMHC sont axées sur l’intervention précoce auprès d’élèves de moins de 12 ans.
Les discussions avec l’équipe du CCMHC ont commencé en 2017, et le partenariat a été officialisé par un protocole d’entente en 2019. Pour le volet de recherche de ce partenariat, la professeure Whitley fait équipe avec J. David Smith, professeur de psychologie du counseling à la Faculté d’éducation, et Maria Rogers, titulaire de la Chaire de recherche du Canada de niveau 2 sur la santé mentale et le bien-être des enfants et des adolescents à l’Université de Carleton. Leur plan de recherche, établi conjointement avec le CCMHC, offre une structure qui permet d’utiliser les données recueillies par l’organisme pour faire progresser les travaux sur l’assiduité scolaire. Les études menées dans le domaine par le passé portaient surtout sur des enjeux comme les absences non motivées et les suspensions scolaires, mais l’approche privilégiée par la professeure prend aussi en considération le vécu des élèves, notamment l’environnement familial et l’anxiété liée à l’intimidation à l’école. « Ce cadre interdisciplinaire et intégré est la pierre angulaire de mon programme de recherche », dit-elle.
Les travaux de recherche entrepris dans le cadre de cette collaboration misent sur la réciprocité à tous les niveaux, tant avec les enfants et leurs familles qu’avec les collectivités locales. Cette réciprocité est ancrée dans l’approche que la professeure Whitley a volontairement choisie, celle de la « recherche lente », qui met l’accent sur le développement des relations et de la confiance au fil du temps. À titre d’exemple, les membres du personnel du CCMHC sont encouragés à transmettre les conclusions qu’ils tirent de leurs observations cliniques et à parler de ce qu’ils ont vu ou entendu, et de ce qu’ils savent ou veulent savoir. La professeure Whitley s’inspire ensuite de leurs réflexions pour rédiger des propositions de recherche et d’évaluation qu’elle soumet pour examen à son équipe. Le CCMHC peut ainsi demander l’aide de la professeure Whitley pour rédiger une demande de subvention importante qui comporte une composante d’évaluation. Ils élaboreront ensemble une proposition audacieuse ayant des retombées sur le plan clinique et sur le plan de la recherche.
La professeure Whitley décrit la collaboration avec le CCMHC comme « fructueuse et joyeuse » et ajoute qu’elle constitue « un bon exemple d’un partenariat productif entre la communauté et le milieu universitaire ».
« Au CCMHC, nous constatons chaque jour à quel point l'école peut être un espace de croissance, de connexion et d'appartenance, en particulier pour les enfants confrontés à des défis en santé mentale et en développement », déclare le directeur général du CCMHC Michael Hone, M.Ed., PA.
« Notre partenariat avec la professeure Whitley et son équipe a approfondi notre compréhension des nombreux facteurs qui influencent l'assiduité scolaire et nous a aidés à concevoir des interventions précoces qui sont à la fois cliniquement éclairées et ancrées dans des expériences vécues. Cette collaboration nous permet de transformer ce que nous savons en stratégies fondées sur des données probantes qui soutiennent les familles de manière plus holistique », ajoute Hone.
Ensemble, nous construisons des chemins vers la résilience, l'inclusion et de meilleurs résultats pour les élèves qui en ont le plus besoin ».

« Les écoles sont des lieux où tous les élèves, y compris ceux ayant un handicap, peuvent recevoir l’aide et les services dont ils ont besoin pour réussir... »
Jess Whitley
— Titulaire de la Chaire de recherche de l’Université sur l’inclusion, la santé mentale et l’assiduité
Des synergies pour accroître l’impact
Les efforts conjugués de l’équipe de recherche et du CCMHC ont donné lieu à des initiatives conjointes avec 20 organismes locaux et conseils scolaires desservant des collectivités de l’est de l’Ontario. L’établissement de relations avec des organisations d’aide aux familles telles que l’Organisme communautaire des services aux immigrants d’Ottawa (OCISO) est l’une des nombreuses réalisations auxquelles a contribué ce partenariat. Les travaux menés par la professeure Whitley avec l’organisme ont été financés par une subvention de recherche communautaire de l’Université. La collaboration a fait l’objet d’un article récent sur l’aide apportée à la population immigrante et réfugiée pour qu’elle reste aux études.
La création du Partenariat canadien pour la fréquentation scolaire (PCFS) est une autre réussite remarquable que ces diverses collaborations ont rendue possible. Le PCFS est un pôle d’apprentissage, de recherche et de réseautage pour les équipes de recherche, les organismes, les conseils scolaires et les familles.
« À notre avis, l’intérêt du PCFS réside dans le fait qu’il sert de lien entre des partenaires qui, sans lui, n’auraient pas uni leurs forces », explique la professeure Whitley. « Ensemble, on peut contribuer à mieux faire connaître ce qui se passe dans les différents secteurs et dégager une compréhension commune de la question de l’assiduité scolaire en tenant compte de sa complexité et de la manière dont elle peut être étudiée et abordée. »
« Participer à ce partenariat a réaffirmé les valeurs fondamentales qui guident notre travail au CCMHC, dit M. Hone. Il s'agit d'établir des liens significatifs entre les individus, entre les systèmes, et surtout, entre les enfants et les soutiens dont ils ont besoin pour s'épanouir.
Le Partenariat canadien pour la fréquentation scolaire a créé un espace vital pour l'apprentissage partagé, la collaboration et l'innovation. Au centre de tout cela il y a les enfants et les familles que nous nous engageons à soutenir chaque jour », ajoute-t-il.
Préparer l’avenir
En tant que titulaire de la Chaire de recherche de l’Université sur l’inclusion, la santé mentale et l’assiduité scolaire, la professeure Whitley continuera de collaborer avec le CCMHC. Les projets à venir comprennent la production d’un nouveau balado sur la fréquentation scolaire intitulé Be There, l’organisation de webinaires trimestriels avec les conseils scolaires, les organismes partenaires et l’Ontario Association for Counselling and Attendance Services (OACAS), et la tenue d’un sommet annuel du PCFS sur le campus de l’Université d’Ottawa. Ce sommet réunira des chercheuses et chercheurs du Canada et d’ailleurs, des familles, des représentantes et représentants des organismes concernés et d’autres acteurs du secteur de l’éducation.
« Je suis persuadée que c’est seulement en établissant de véritables partenariats avec d’autres qu’on pourra comprendre et aborder les difficultés auxquelles se heurte un grand nombre d’enfants et de jeunes. Ça vaut aussi pour les enjeux liés à l’assiduité scolaire! Le choix de s’associer à une chaire de recherche n’est qu’un exemple du leadership visionnaire dont fait preuve l’équipe du CCMHC dans la communauté. Et il cadre avec notre objectif commun d’améliorer le bien-être des enfants, des jeunes et des familles qui rencontrent beaucoup d’obstacles », affirme la professeure Whitley.
À propos de Jess Whitley
Jess Whitley est professeure titulaire et vice-doyenne à la recherche et au développement professionnel, et elle occupe la Chaire de recherche de l’Université sur l’inclusion, la santé mentale et l’assiduité scolaire. Ses travaux récents comprennent les titres suivants : « Parental Self-Efficacy During COVID-19: Parents’ Experiences Supporting the Learning of their Child(ren) with Special Educational Needs » (2025) et « Critical Windows: Perspectives of Parents of Children and Youth with Special Educational Needs Regarding Social Wellbeing During COVID19 » (2025).