Deux fois par année, la Faculté des sciences accueille la communauté universitaire pour présenter les dernières recrues de son corps professoral.

Printemps - 13 mai

Jouer sur le clavier isotopique avec le SAiVE Lab pour des applications en sciences environnementales et en écologie

Par Clément Bataille, Département des sciences de la Terre et de l'environnement

Résumé: Les éléments existent sous différentes formes appelées isotopes. Les isotopes sont donc les éléments constitutifs de tous les matériaux organiques et inorganiques de l'univers. La distribution des isotopes dans les substrats environnementaux enregistre et préserve la fascinante mélodie des processus naturels passés et présents qui se sont produits depuis la nuit des temps. Les géochimistes isotopiques, comme moi, et les étudiants de mon groupe, le SAiVE, sont des détectives qui essayent de traduire la mélodie cachée contenue dans le langage chimique de la distribution isotopique. Mes étudiants et moi-même essayons de comprendre comment la distribution des isotopes dans les substrats environnementaux nous informe sur les processus environnementaux et écologiques à la surface de cette planète. Nous analysons les proportions d’isotopes dans les matières organiques telles que les cheveux, les plumes, les os ou les défenses, pour reconstituer l'histoire, le régime alimentaire ou la mobilité des animaux et des humains. En reconstruisant les routes migratoires et la connectivité des populations, nos travaux ont des applications directes dans la conservation, la paléoécologie, l'archéologie et la médecine légale. Nous analysons également la distribution des isotopes dans les molécules d'eau et dans les métaux dissous dans les rivières pour comprendre d'où viennent les solutés et comment les processus glaciaires, physiques et biologiques sur les bassins versants influencent la chimie des rivières. En traçant les sources de solutés et en reconstruisant les processus qui contrôlent la chimie de l'eau dans les rivières de l'Arctique, nous aidons à atténuer les risques associés à la qualité de l'eau et à l'approvisionnement en eau. Enfin, nous analysons également les isotopes des roches anciennes pour reconstruire les climats du passé et les processus environnementaux qui ont conduit à des extinctions massives dans l'histoire de cette planète. Au cours des 50 prochaines années, notre planète sera confrontée à des défis environnementaux massifs allant des crises de l'eau aux pertes de biodiversité. La géochimie des isotopique sera essentielle pour prévoir et se préparer à certains de ces défis environnementaux. Dans cette courte conférence, je donnerai un aperçu de certaines des recherches en cours dans le laboratoire SAiVE de l'Université d'Ottawa, mais plus largement, j'espère vous convaincre de l’immense potentiel de l’isotopie.

Biographie : Si vous me demandiez quand ma carrière scientifique a vraiment commencé, je vous dirais qu'elle a commencé quand j'étais un garçon de 4 ans courant dans mon jardin dans la campagne française, sprintant gaiement de fleur en fleur et identifiant chaque nouveau bourgeon qui s'ouvrait avec le soleil printanier. Ma mère rapporte que je passais des heures à cette activité. Ma carrière a commencé dans ces moments-là. Les sciences de la Terre et de l’environnement ne concernent pas simplement ce que nous apprenons dans un laboratoire ou une salle de classe; elles commencent par l'émerveillement. Tout scientifique, pour être un bon chercheur et un bon éducateur, doit commencer par admirer l’univers. Lorsque votre carrière vous amène à une science de plus en plus spécialisée, il est bon de se souvenir de ces premiers moments d'émerveillement qui nous ont peut-être une fois laissés silencieux face à une montagne ou à un océan, ou même à une fleur. Cette passion pour le monde naturel est ce qui m'a amené à étudier les sciences au premier cycle. J'ai commencé par étudier l'agronomie et l'ingénierie environnementale à l'Institut Polytechnique de Toulouse. Au cours de ma maîtrise, je me suis concentré sur des questions liées au rôle des pratiques agricoles sur l'hydrochimie des eaux fluviales et j'ai découvert le monde fabuleux de la géochimie isotopique. J'ai immigré aux États-Unis pour faire mon doctorat en géologie et géophysique à l'Université de l'Utah. Au cours de ma thèse, j'ai développé de nouveaux outils isotopiques pour suivre la mobilité des animaux et reconstruire les paleoclimats. Après avoir terminé mon doctorat en 2014, j'ai travaillé en tant que scientifique de la Terre chez Chevron Corporation, développant de nouveaux outils géochimiques pour évaluer la connectivité des réservoirs. Je suis retourné dans le milieu universitaire en tant que stagiaire postdoctoral en géosciences à l'Université de Caroline du Nord en 2016 pour travailler à affiner les causes de l'extinction de masse la plus catastrophique sur Terre. Je me suis joint à la faculté des sciences de l'Université d'Ottawa en tant que professeur adjoint en sciences de la Terre et de l'environnement à l'automne 2017 où j'ai créé le SAiVE Lab. Mon groupe est hautement interdisciplinaire et actuellement composé de 2 post-doctorants, 2 doctorants, 3 étudiants MSc et 1 étudiant de premier cycle répartis entre BIO et EES. Je suis récemment devenu directeur du Jan Veizer Stable Isotope Laboratory, la principale plateforme d'analyse des isotopes stables à l'Université d'Ottawa.

Comprendre et prévoir les réactions des espèces aux changements climatiques

Par Heather Kharouba, Département de biologie

Résumé : Grâce aux efforts considérables déployés au cours des deux dernières décennies, il existe désormais de nombreux exemples documentés de la manière dont les espèces réagissent aux changements climatiques. Cependant, notre compréhension des mécanismes sous-jacents à ces réponses, et des conséquences de ces réponses pour les espèces et leurs communautés, reste limitée. Nos travaux ont démontré qu'au cours des dernières décennies, les changements climatiques ont entraîné des modifications importantes dans le calendrier des interactions entre les espèces. Pourtant, il reste difficile de comprendre les conséquences de ces changements pour les communautés écologiques. Je donnerai un aperçu de ce que ces conséquences peuvent être et pourquoi il est difficile de prédire la prévalence et l'ampleur de ces conséquences. Je parlerai également des recherches menées dans le laboratoire qui visent à comprendre comment le climat influence la répartition des espèces, une relation essentielle pour prédire comment les espèces modifieront leurs aires de répartition en réponse aux changements climatiques. Grâce à une combinaison d'expériences en laboratoire et de modélisation écologique sur différentes espèces, mon laboratoire teste des hypothèses sur les facteurs climatiques qui limitent l'aire de répartition des espèces de papillons et de plantes.

Biographie : Heather Kharouba est professeur agrégée au département de biologie où elle étudie l'écologie du changement global. Ses recherches actuelles portent sur la manière dont les espèces réagissent aux changements climatiques et sur les conséquences de ces réactions pour les communautés écologiques, avec un accent particulier sur les interactions plantes-insectes.

Passer au vert : Libérer le potentiel des plantes et des microbes

Par Allyson MacLean, Département de biologie

Résumé : Le laboratoire MacLean se concentre sur l'amélioration de la compréhension des mécanismes qui sous-tendent les interactions entre les plantes et les microbes, avec des projets qui englobent les symbioses bénéfiques et pathogènes. Nous sommes particulièrement intéressés par l'identification des protéines microbiennes (effecteurs) qui favorisent la colonisation de l'hôte, et des protéines de l'hôte végétal qui contribuent à la régulation des symbioses. Plus récemment, en réponse à la pandémie de COVID-19, nous avons étendu nos recherches au développement de vaccins oraux et intra-nasaux à base de plantes. Dans notre laboratoire, tout tourne autour de la manière dont nous pouvons mieux utiliser les plantes et leurs symbiotes pour améliorer la santé, l'agriculture et l'environnement.

Biographie : Allyson MacLean a obtenu un baccalauréat en sciences, puis un doctorat à l'Université McMaster en 2009, avec une thèse portant sur les systèmes de catabolisme et de transport de l'endosymbiote bactérien de la luzerne, Sinorhizobium meliloti. Microbiologiste de formation à l'origine, elle a obtenu en 2010 une bourse internationale Marie Curie pour mener un projet postdoctoral au John Innes Centre de Norwich, en Angleterre, l'institut de recherche sur les plantes le mieux classé au monde. La professeure MacLean y a étudié le rôle des protéines effectrices bactériennes dans la modification de la croissance et du développement des plantes infectées. En 2014, elle a été recrutée comme chercheuse postdoctorale à l'Institut Boyce Thompson de l'Université Cornell, où elle a examiné le rôle des gènes et des protéines fongiques dans la symbiose mycorhizienne à arbuscules, un partenariat bénéfique entre les plantes et les champignons. Elle a rejoint le Département de biologie de l'Université d'Ottawa en octobre 2017, où elle dirige un programme de recherche largement axé sur l'amélioration de la compréhension - et de l'exploitation - des interactions plantes-microbes.

Nouveaux outils et méthodes pour la synthèse organique

Par Fabien Gagosz, Département de chimie et sciences biomoléculaires

Résumé: Nos travaux de recherche concernent principalement la conception de nouveaux outils pour la catalyse et le développement de nouvelles méthodes de synthèse. Un intérêt spécial est porté pour la catalyse avec les métaux de transition et plus précisément l’or. Cette courte présentation mettra en valeur certains travaux récents dans ces domaines.

Biographie : Fabien Gagosz est né en France et a soutenu sa thèse de doctorat en 2002 (École Polytechnique, France). Il a démarré sa carrière en recherche au Centre national de recherche scientifique (CNRS) en 2004 et fut promu Directeur de Recherche en 2012. En 2016, il a rejoint l’Université d’Ottawa où il est actuellement Professeur dans le Département de chimie et sciences biomoléculaires.

Automne - 16 décembre

Que peuvent nous apprendre les algues vertes de l'Antarctique sur la vie photosynthétique dans les environnements extrêmes ?

Par Marina Cvetkovska, Département de biologie

Résumé : Les algues vertes de l'ordre des Chlamydomonadales, dont l'espèce phare Chlamydomonas reinhardtii, fascinent les biologistes depuis des décennies. Des développements importants dans les principaux domaines des sciences de la vie trouvent leur origine dans la recherche sur les Chlamydomonas, couvrant divers domaines de la biologie des plantes et des algues (p. ex., la photosynthèse), de l'évolution (p. ex., la multicellularité) et de la recherche médicale (p. ex., l'optogénétique). Dans le laboratoire Cvetkovska, nous travaillons avec des espèces de Chlamydomonas extrêmophiles provenant d'habitats aquatiques recouverts de glace en Antarctique et en Arctique. Ces extrêmophiles obligatoires (psychrophiles) comptent parmi les algues polaires les mieux étudiées et constituent une ressource largement inexploitée pour identifier les traits d'adaptation au froid, les nouveaux métabolites et les enzymes actives au froid. Les psychrophiles sont exceptionnellement adaptés pour prospérer dans une pléthore de conditions extrêmes, mais elles sont sensibles aux changements environnementaux et ne peuvent généralement pas survivre à des augmentations de température, même modérées. Aujourd'hui, avec le changement climatique rapide qui nous attend, l'étude des psychrophiles est plus importante que jamais. Deux questions nous intéressent plus largement : (1) Comment les algues polaires s'adaptent-elles à un environnement extrême caractérisé par des températures basses permanentes, une salinité élevée et une faible luminosité ? (2) Comment les algues psychrophiles répondent-elles au stress environnemental induit par le climat qui menace les écosystèmes polaires sensibles ? Dans ma présentation, je discuterai de nos récentes avancées dans ces domaines, ainsi que des opportunités et des défis futurs qui nous attendent.

Biographie : La professeure Marina Cvetkovska s'est jointe au Département de biologie de l'Université d'Ottawa en 2019. Elle a obtenu son doctorat à l'Université de Toronto (2006-2012) en se spécialisant dans les réponses des plantes aux stress biotiques et abiotiques, suivi d'un stage postdoctoral financé par le CRSNG à l'Université Western centré sur l'adaptation des algues aux environnements extrêmes (2014-2018). À l'Université d'Ottawa, le groupe Cvetkovska se concentre sur l'élucidation des mécanismes de tolérance au stress et d'adaptation chez les plantes et les algues en utilisant une combinaison de physiologie, de biologie moléculaire et de bioinformatique.

L'Algèbre supérieure

Par Simon Henry, Département de mathématiques et de statistique

Résumé : "L'algèbre supérieure" est ce que l'on obtient quand on essaye d'étudier des structures algébriques dans des situations où l'égalité doit être remplacée par des notions plus flexibles, en général où les objets que l'on considère ont plus d'une façon d'être "égaux". Ce genre de structure supérieure est apparu dans de nombreuses branches des mathématiques : à l'origine en topologie dans les années 60 et 70, puis rapidement en algèbre homologique, ensuite en théorie des catégories dans les années 80, en géométrie algébrique dans les années 2000, et plus récemment en géométrie différentielle et symplectique, en combinatoire et même dans certaines branches de la logique... Mais encore aujourd'hui ces structures sont notoirement difficiles à manipuler et cela a considérablement ralenti leur développement. J'expliquerai rapidement et de façon informelle ce que sont ces structures, pourquoi elles sont difficiles à manipuler et comment on espère améliorer les méthodes à notre disposition pour travailler avec ces structures.

Biographie : Après ses études de premier cycle et de maîtrise à l'École normale supérieure de Paris, le professeur Simon Henry a terminé son doctorat en 2014, sous la direction d'Alain Connes. Ses recherches doctorales portaient sur la théorie des topos et les algèbres d'opérateurs. Il a ensuite déménagé à Nijmegen (Pays-Bas) pour un postdoc à l'Université Radboud, au sein du groupe de recherche en topologie algébrique d'Ieke Moerdijk, où il a commencé à travailler sur l'algèbre supérieure et les catégories de modèles. Il a effectué deux autres postdocs - l'un au collège de France à Paris entre 2015 et 2017 et le second à l'Université Masaryk de Brno (République tchèque) entre 2017 et 2019 - avant de rejoindre le groupe de logique du département de mathématiques et de statistique de l'Université d'Ottawa en 2019.

Évolution des stratégies biodémographiques dans un environnement changeant grâce à des études à long terme sur les vertébrés dans la nature

Par Julien Martin, Département de biologie

Résumé : Pour expliquer la remarquable diversité des espèces et la variation entre les individus d'une même espèce, il faut comprendre comment l'évolution façonne les organismes dans leur environnement naturel. Dans les systèmes naturels, les ressources énergétiques sont limitées dans leur abondance, dispersées dans l'espace et restreintes dans le temps, ce qui oblige les organismes à ajuster leur allocation énergétique entre leurs traits et leur budget temps entre les activités. La théorie de la biodémographie cherche à expliquer les compromis effectués par les individus pour optimiser leur reproduction et leur survie en fonction des conditions environnementales. Pour comprendre comment les espèces s'adaptent et évoluent dans des conditions changeantes, nous devons les étudier dans leur environnement naturel, où les conditions environnementales changent et fluctuent . Ma recherche est basée sur deux études à long terme d'individus marqués; soient des marmottes à ventre jaune (+60 ans) et des martinets alpins (+20 ans). En utilisant des données à long terme sur les traits morphologiques, physiologiques et comportementaux des vertébrés sauvages et des analyses statistiques de pointe (p. ex., modèle animal, double modèle hiérarchique, analyse de chemin), ma recherche se concentre sur trois aspects principaux : 1) tester les hypothèses clés de la théorie biodémographique et de la génétique quantitative ; 2) évaluer les conséquences évolutives des changements d'environnement ; et 3) mettre en œuvre et évaluer la performance des nouvelles analyses statistiques en écologie.

Biographie : Le Prof. Julien Martin a fait son baccalauréat en France avant de s'installer à Montréal pour faire un MSc avec Denis Réale à l'UQAM (Montréal), sur la personnalité animale. Il a ensuite obtenu son doctorat en 2010 à l'Université de Sherbrooke avec Marco Festa-Bianchet sur l'histoire de vie du mouflon d'Amérique. Après 2 ans de postdoc avec Dan Blumstein à UCLA (Los Angeles, É-U), sur les marmottes à ventre jaune, il a obtenu un poste à l'Université d'Aberdeen, Aberdeen, UK, en 2013. Après 6 ans en Écosse, il a rejoint le département de biologie pour un poste d'écologie quantitative en 2019.